Out of the Box : le défi de l’inclusion à travers l’art

EPIC a eu la chance de rencontrer Teresa Maranzano pour découvrir ou redécouvrir Out of the Box, la Biennale des Arts inclusifs. Un festival pluridisciplinaire unique, destiné et accessible à tout le monde. Danse, théâtre, concert, expositions et tables rondes sont, entre autres, au menu de cet événement qui puise dans le sensible, le puissant et le drôle. Discussion avec Teresa Maranzano, coordinatrice et membre de la direction artistique.

Teresa Maranzano, pourriez-vous nous dire comment est né Out of the Box ?

La première édition a eu lieu en 2013. Au départ c’était un groupement d’associations qui proposaient des événements d’art inclusifs à Genève, subventionnés par le Département de la culture de la Ville de Genève. C’est le service culturel de la Ville qui nous avait conseillé de nous fédérer au lieu de travailler séparément et de faire une proposition unique, c’est ça qui a donné l’input pour devenir un festival.

Découvrez toutes les œuvres de Élodie et Jean Weber lors de l’exposition BRÖ & SISTÂ ToteM EvacuatioN / Total FamilY à la galerie Andata/Ritorno
© Isabelle Meister

Que vise Out of the Box ?

Un des buts de Out of the Box est de décomplexer le handicap, de montrer que cela n’empêche pas de pouvoir s’exprimer artistiquement dans toutes les disciplines, quelles qu’elles soient. Nous œuvrons pour que ces personnes soient considérées comme des artistes à part entière. Les personnes en situation de handicap ont des choses à dire qui nous parlent, qui nous concernent, qui nous touchent parce qu’elles montrent un visage encore caché de la société dans lequel on peut se refléter. Les artistes en situation de handicap revendiquent leur place dans le monde de l’art avec de plus en plus de conviction, et notre festival encourage le monde de l’art à devenir plus inclusif.

Nous constatons que la sphère familiale est le premier noyau dans lequel cette inclusion se joue. Ça touche le corps dans le plus intime, le plus sensible. C’est un peu le fil rouge de cette édition. Et ce qui nous tient à cœur aussi c’est de montrer la diversité des handicaps, c’est-à-dire que parmi les artistes invité·e·x·s, il y en a avec une déficience intellectuelle, avec une déficience visuelle, malentendante·x·s ou avec un handicap physique. Cette multiplicité des handicaps apporte à chaque fois une perspective différente, un travail différent, une rencontre différente en fonction du handicap. 

L’équipe d’Out of the Box est persuadée que l’art a le pouvoir de provoquer des changements durables. Des images issues de spectacles, d’expositions et de toute autre forme artistique peuvent se graver dans l’esprit des spectateur·rice·x·s, dans la conscience du public, et apporter une véritable transformation de conception, de compréhension, et c’est tout le but de la Biennale.

L’inclusion se fait-elle en programmant des artistes avec et sans handicap ?

Oui bien sûr. On soutient les artistes qui ont l’envie de travailler avec des personnes en situation de handicap. Les personnes handicapées ont un univers à nous dévoiler, à nous faire découvrir, qui est extrêmement enrichissant, soit parce qu’il parle de nos fragilités à nous tou·te·x·s, mais aussi parce qu’il nous montre une facette du monde qui est extrêmement originale, riche de points de vue insolites, drôles parfois, cocasses. La beauté du festival c’est de réunir tous ces regards, toutes ces pratiques, toutes ces forces. Ce qui ressort de ces rencontres et de ces dialogues est unique.

Formes, une exposition de Perrine Lapouille © Perrine Lapouille

Ça fait dix ans que la Biennale existe, c’est donc une édition-anniversaire. Qu’est-ce qu’on peut tirer de ces dix dernières années ? Comment le lien avec le public a évolué par exemple ?

Je pense qu’il y a une amélioration certaine. Contrairement à dix ans en arrière où il fallait tout expliquer, situer le cadre, aujourd’hui notre programmation est reçue avec plus de facilité. C’est pareil avec les publics et les médias, qui sont à présent ouverts, preneurs, attentifs et parfois enthousiastes face à nos propositions. Néanmoins, il reste encore beaucoup à faire. On aimerait qu’il y ait plus de productions artistiques locales. En dix ans, on constate qu’il n’y a pas plus de compagnies, pas plus de danseur·euse·x·s, pas plus d’artistes, pas plus d’ateliers, de lieux qui soient spécialement ouverts et adaptés pour accueillir des artistes ayant toutes sortes de handicaps. On aimerait qu’il y ait plus d’input pour développer la création sur le territoire. Ça reste à faire.

En règle générale, il y a beaucoup qui se fait pour l’accessibilité. D’ailleurs, l’association Out of the Box coordonne les Sorties RELAX. Il s’agit d’un programme porté par une dizaine d’institutions culturelles genevoises offrant un dispositif facilitant l’accueil, l’accessibilité et l’accompagnement des personnes en situation de handicap, et ce, durant toute l’année.

Forme(s) de vie de Éric Minh Cuong Castaing par la Cie Shonen à la Comédie de Genève
© Shonen

Est-ce qu’il y a un domaine artistique où vous ressentez une plus grande résistance face à l’inclusion ?

Pas forcément une résistance, mais je dirais peut-être qu’au niveau de la musique c’est plus difficile. En tout cas, il y a peu de groupes de musique inclusifs en Suisse. Je ne saurais pas vous dire si cela dépend d’une virtuosité qui ferait défaut au niveau de l’usage d’instruments de musique ou d’autre chose.

Qu’est-ce que Out of the Box souhaiterait développer pour les prochaines éditions ? Des nouveautés ?

On va probablement développer le cinéma à partir de l’édition suivante parce qu’on voit qu’il existe beaucoup de productions intéressantes qu’on souhaiterait davantage mettre en avant.

Par ailleurs, nous aimerions nous entourer davantage de personnes en situation de handicap dans le cadre de l’organisation. Actuellement, plusieurs personnes porteuses de handicap font partie du comité de l’association et de l’équipe de la Biennale. Nous souhaitons poursuivre dans ce sens.

Quelles mesures d’accessibilité proposez-vous pendant Out of the Box ?

La nouveauté cette année, c’est notre site internet entièrement écrit en FALC (facile à lire et à comprendre). Le dispositif RELAX est disponible pour la majorité des événements. L’atelier de danse mené par Caroline de Cornière est ouvert à tou·te·x·s. Le spectacle Forme(s) de vie est audio-décrit et la représentation Une tentative presque comme une autre est surtitrée.

Soyez au rendez-vous pour découvrir toutes les pépites des arts inclusifs, du 11 mai au 11 juin 2023 dans différents lieux genevois. Retrouvez la programmation juste ici.

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