Un premier vinyle pour le label Temporal Variation

Matthieu Benjamin, gérant du label Temporal Variation ©Nikita Thévoz

Lancé il y a moins d’une année, le label lausannois Temporal Variation vient de sortir un premier EP rassemblant quatre morceaux techno d’artistes internationaux. Un EP qui en appellera d’autres si l’on en croit le fondateur et directeur artistique du label Matthieu Benjamin.

Salut Matthieu, peux-tu nous expliquer comment tu es arrivé dans le monde de la techno ?

J’ai d’abord commencé comme bénévole au Romandie, avant d’y devenir stagiaire pendant un moment. En parallèle, j’étudiais la sociologie à l’uni et je suis parti en Erasmus à Hambourg pour terminer mes études. Sur place, j’avais des cours la moitié de la semaine, et l’autre moitié je la passais à assister à des concerts et faire de la photo. Car au départ, j’étais plutôt axé photo, je comptais même rentrer à l’ECAL une fois revenu en Suisse. Mais un jour, un ami m’a fait découvrir la musique électronique, j’ai pris une grosse claque et ai décidé de me lancer là-dedans.

Tu t’es lancé là-dedans, mais il y a écart important entre simplement écouter de la techno et fonder son propre label… Comment en es-tu venu à avoir l’envie fonder un label ?

C’est sûr ! Une fois rentré en Suisse, j’ai acheté des platines vinyle et ai passé une année à acheter des disques et écouter à fond de la techno. C’est une période où je me suis vraiment enrichi musicalement. Je me suis découvert une véritable passion du vinyle et j’ai commencé à mixer dans différents lieux à Lausanne et ailleurs en Suisse.

Il y a quelques temps, j’ai commencé à organiser une série d’événements techno à Lausanne et à programmer des artistes. Rapidement, je me suis dit que je voulais monter un label pour partager ma vision spécifique de la techno et sortir la musique d’autres artistes dans le domaine.

On s’est alors organisé avec ma copine, Alex Nantaya, pour fonder le label Temporal Variation. Au sein de cette organisation, je m’occupe de la direction artistique, et elle se charge de tout l’aspect communication. On a une page Bandcamp et on travaille avec le distributeur Triple Vision qui met en vente nos sorties dans les magasins pertinents.

Fonder un label de musique, ça demande quoi comme compétences ?

Tout d’abord, une vision ! Habituellement, un label c’est une personne avec une certaine vision de la musique qui a l’envie de la partager.

Après, gérer un label cela demande évidemment beaucoup de temps. Tu traites avec de nombreuses personnes : les personnes qui nous contactent pour promouvoir leur musique, les artistes pour les sorties, les distributeurs, etc. Si tu ne souhaite pas que faire des sorties en format numérique, cela prend vite du temps !

Enfin, cela demande également de l’argent. En Suisse, c’est pas évident de te trouver des aides financières quand tu promeus des artistes internationaux, comme on souhaite le faire avec Temporal Variation.

Parle-nous un peu de votre vision avec Temporal Variation.

Notre objectif premier est de refléter la musique qu’on trouve dans nos soirées. On souhaite promouvoir un type de techno plutôt hypnotique, assez classique, mais que j’avais de la peine à trouver dans les soirées que je fréquentais.

De plus, nous avons une connexion personnelle avec chaque artiste qu’on met en avant. C’est un élément essentiel pour nous. On souhaite créer des liens avec les artistes dont nous apprécions la musique et qui sont sur notre label.

Enfin, on a à cœur que toutes nos sorties se fassent sur vinyle, bien que cela prenne un certain temps. Le premier par exemple a mis dix mois à arriver.

Pourquoi faire ce choix plutôt chronophage de publier sous forme de vinyle ?

Selon moi, une sortie seulement en format numérique n’a pas assez d’impact, elle se fait oublier beaucoup trop vite. Le vinyle est un objet tangible qui reste et traverse le temps. De plus, sauf exception, les artistes (et moi) ne touchent quasiment rien avec une sortie, car l’investissement financier pour produire un vinyle est important. Mais au moins, il y a un objet à la fin qu’on peut leur donner, cela valorise leur travail. C’est une preuve d’engagement de la part du label qui est essentielle pour moi.

Matthieu avec le premier vinyle du label (© Alex Nantaya)

Et donc sur cette première sortie, quels artistes retrouve-t-on ?

Alors sur cette compilation, nommée Temporal Variation VA001, nous sommes quatre artistes : Arthur Robert, Cirkle, Pulso et moi-même. Chacune des tracks se suit et correspond à différentes étapes d’un set, avec une montée progressive en termes d’énergie et de vitesse. L’idée était de créer un objet utile pour les DJs et qui reflétait les différentes facettes musicales actuelles et à venir du label.

On a fait une sortie en format numérique déjà en juillet dernier, mais on a eu quelques soucis qui ont engendré du retard dans la distribution, ce qui fait que le vinyle est sorti seulement le 31 mars dernier. Après, l’avantage d’avoir sorti un format numérique avant le vinyle, c’est qu’on a déjà reçu d’excellents retours et qu’on a eu de nombreuses précommandes du vinyle ! Je ne m’attendais pas à autant d’engouement.

Avez-vous d’autres sorties prévues sur votre label d’ici cet été ?

Oui, on bosse sur le vinyle suivant, un premier EP d’un artiste que j’apprécie beaucoup et dont l’identité sera dévoilée en temps voulu. Tout ce que je peux dire pour le moment c’est qu’il est actif dans la scène depuis quelques années déjà et qu’il a même été mon mentor pendant quelques temps ! J’ai déjà eu l’occasion de tester ses morceaux au Zoo et ma copine a fait de même quand elle mixait au Motel il y a quelques jours. Et les deux ont est unanimes sur la question : c’est vraiment bien !

Par contre, ça va prendre un petit moment avant qu’on puisse sortir le vinyle. On va travailler avec le même distributeur, car il nous permet d’être dans tous les magasins de techno. Pour moi, ce n’est pas un mal de devoir attendre… Je préfère avoir des sorties assez espacées dans le temps mais qui nous plaisent à fond, plutôt que d’essayer de sortir le plus de choses possibles dans un court laps de temps.

Au niveau de la scène locale techno, comment se porte-t-elle selon toi ?

Pas mal de choses se passent, des artistes émergent comme La Penderie Noire et Owelle, mais il y a aussi pas mal de collectifs qui font bouger la scène et qui tissent des liens entre les Suisses allemands et les Romands. Du côté des clubs, beaucoup mettent en avant des artistes locaux, ce qui montre que c’est possible de monter des projets qui marchent et qui peuvent être exportés, c’est motivant ! Certains clubs, notamment à Genève, prennent des DJs en résidence et les font jouer régulièrement, ce qui permet aux artistes de rapidement s’améliorer. Enfin au niveau des labels, je citerais Bipolar Disorder qui a tout pété récemment et qui est une source d’inspiration pour moi.

Du côté des raves parties, c’est toujours une belle opportunité pour les artistes, notamment émergents, de se faire connaître et se créer un nouveau public. Les expériences qu’on vit dans ce genre de soirées sont souvent plus magiques qu’une soirée dans un club. Les liens qui se créent sont différents, plus personnels.

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