Ce n’est plus un secret pour personne : la ville de Vevey regorge de musicien·ne·s talentueux·euses. Grâce à un Service culturel municipal entreprenant mais surtout à des jeunes artistes motivé·e·s, la scène musicale locale bouillonne comme jamais. C’est dans ce contexte que plusieurs groupes de la région ont décidé, fin 2019, de se regrouper sous la forme d’un label : Bleu Lagon Records. Cet été, après une longue période coronarivus, le label peut enfin développer ses activités. Aria Konishi et Matthew Franklin, deux des membres fondateurs, reviennent sur l’origine et l’avenir du label ainsi que sur l’état actuel de la scène musicale veveysane.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Aria Konishi (AK) : Je suis photographe de formation et musicien à temps partiel. Je suis le président de l’association Bleu Lagon Records.
Matthew Franklin (MF) : Je suis ingénieur électronique de formation. Cette année j’ai décidé de me lancer et de me professionnaliser dans la musique. Je suis actuellement une formation de technicien du spectacle au Rocking Chair.
Quelle est la genèse de Bleu Lagon Records ?
AK : Bleu Lagon Records existe depuis plus ou moins une année officieusement, mais officiellement il a été lancé samedi 11 juillet. Tout est parti d’une envie de partage entre tous les groupes veveysans, le but était d’avoir un endroit où l’on pourrait rassembler toutes nos forces afin de faire connaître la musique veveysane en Suisse romande, en Suisse alémanique, voire même à l’international.
MF : À Vevey, on a une scène bouillonnante qui rayonne en Suisse. On s’est dit que ce serait chouette d’avoir un label collaboratif pour mettre ensemble nous ressources matérielles et humaines. En plus, être regroupé sous un label nous permet de mieux collaborer avec les autres acteur·trice·s de la vie associative locale ou même les commerces de la ville.
Combien de membres font partie du label ?
MF : Nous sommes 12 groupes, pour le moment uniquement de Vevey. Cela représente environ une quarantaine de personnes. Pour la première année, nous voulons rester entre groupes veveysans et fonder des bases solides pour accueillir éventuellement plus tard des groupes qui viennent d’ailleurs.
La situation sanitaire actuelle vous a-t-elle poussée à faire les choses autrement que prévu ?
MF : Oui. On devait officialiser le label via le vernissage d’une compilation sur vinyle de morceaux de plusieurs groupes de la région sur le thème du Léman. On a enregistré ça durant un week-end d’octobre l’année dernière, puis mixé et masterisé le tout. Initialement, on voulait vernir le label en même temps que le vinyle, mais le virus a changé la donne. Avec l’annulation des concerts de ce début d’été, on s’est dit qu’au lieu d’un grand vernissage, on ferait plusieurs petits concerts tout au long de l’été. Il y en a eu un le samedi 4 juillet, un le samedi 11 et il y en aura d’autres le 17 juillet, le 8 août et le 15 août. Tous les concerts sont prix libre, l’entrée est gratuite et les groupes sont payés au chapeau.
À qui s’adressent ces concerts ?
AK : Nous n’avons pas de public cible particulier. L’envie est de faire revivre gentiment mais sûrement la culture, toujours endormie ces temps. On veut remettre en marche la machine culturelle musicale nécessaire à la vie des veveysan·e·s.
En quoi la scène culturelle musicale veveysane est-elle spéciale en 2020 ?
AK : Pour ma part, j’ai toujours eu l’impression qu’elle a toujours été très dynamique, du moins dès le moment où j’ai commencé à assister des concerts.
MF : Selon moi, ce qui rend la ville spéciale, ce n’est pas le fait d’avoir des gens plus talentueux ici qu’ailleurs, mais c’est que la Ville de Vevey met en place des aides pour développer des projets musicaux de jeunes, comme par exemple les enregistrement d’album. On s’est tous rencontré·e·s grâce à l’Association de la Ferme Menthée (AMF), un organisme soutenu par la Ville qui met à disposition gratuitement des locaux de répétition. Il y a cinq locaux côte à côte, donc forcément, les groupes se voient, discutent et partagent. Et puis il y a aussi les salles de concerts du Rocking Chair et du Bout du monde, qui proposent un axe « local » dans leurs programmations.
Tous ces éléments forment un tout qui donne envie de faire des projets : on a des locaux pour répéter, du financement pour nos projets et un bassin de musicien·n·e·s locaux·ales. C’est comme une grande famille.
Est-ce que le même constat peut être fait pour les autres scènes culturelles de Vevey, comme celles du théâtre, de la danse ou des arts visuels par exemple ?
MF : Le tissu associatif à Vevey est très vivant. La Direction de la culture de Vevey soutien de nombreux projets, qu’ils soient musicaux, d’’art visuel, de théâtre, de danse, etc. La ville est petite, tout le monde se connaît, on est donc constamment en contact avec les associations et la municipalité. Ce qui est agréable, c’est qu’on a l’assurance que chaque projet culturel qui émane de citoyen·ne est lu avec attention par la Ville.
AK : De manière générale, on ressent un grand soutien moral à Vevey de la part de la population pour les projets artistiques. Il y règne une bonne énergie et un esprit communautaire local qui pousse à faire bien les choses.
Pour revenir à Bleu Lagon Records, vous avez parlé d’organisation de petits concerts en ville, mais aviez-vous déjà de l’expérience en la matière ?
AK : C’est une de mes premières véritables expériences dans l’organisation de concerts. Mais vu que je fais partie d’un groupe de musique, je connais déjà pas mal d’aspects liés, de près ou de loin, à ça.
MF : Pour ma part, j’ai organisé l’été dernier le « Vinaigre festival » : une série de dix concerts organisé avec le label lausannois Life After Gods à Vevey, en parallèle à la Fête des Vignerons. C’était ma première expérience pour organiser un événement de A à Z : monter le matos, faire la programmation, faire la communication, coordonner le tout, etc.
Comme le dit Aria, avec nos groupes respectifs, on s’est souvent chargés de certaines parties d’organisation, et on a appris sur le tas. Aujourd’hui, grâce aux collaborations dans le cadre de Bleu Lagon Records, nos événements sont organisés de manière plus fluide car chacun apporte son expérience et fait en sorte que tout s’aligne bien.
AK : En tout cas pour ma part, je trouve cette première expérience épanouissante !
MF : Le but c’est que ça reste un plaisir pour chacun·e. On veut se réunir simplement, sans se compliquer la vie, mais en assurant tout de même une certaine qualité.
Qu’est-ce que ça donne l’organisation d’un événement en temps de virus ?
MF : On n’est pas trop touché·e·s par ça, car nos événements regroupent entre 50 et 100 personnes. Ce qui change, c’est la mise en place du système de traçabilité et la prise de numéros des gens. Vis-à-vis de la programmation, cela aurait pu nous poser des problèmes, mais notre prog est 100% locale, donc il n’y a pas de soucis de ce côté-là.
Comment souhaitez-vous voir évoluer la scène musicale veveysane dans les prochaines années ?
MF : J’ai envie de la voir grandir encore et encore, car rien ne me rend plus heureux que de voir et encourager des groupes de jeunes qui font leur premier concert live. Je trouverai beau également si différentes formes artistiques se croisaient dans le cadre d’une même événement, typiquement en mélangeant arts vivants et arts visuels, par exemple.
AK : Je pense que les différentes formes culturelles vont de plus en plus se soutenir mutuellement. Je souhaiterais en tout cas voir ça, une explosion de culture, que cela déborde de partout.
MF : À travers nos rencontres et concerts, on s’est rendus compte qu’il y a plusieurs autres villes en Suisse, comme Bienne ou Lugano, qui fonctionnent de la même manière et qui ont les mêmes intérêts que nous. Dans un avenir proche on aimerait par exemple faire une soirée Vevey à Bienne et une soirée Bienne à Vevey.
Et comment envisagez-vous l’avenir du label ?
AK : Le label tendra toujours vers le même but : on veut montrer la force de la musique veveysane et suisse, qui est sous-représentée à l’échelle internationale. Les prochaines étapes sont les six ou sept concerts que nous organisons cet été. Mais nous avons plein de projets à développer, un des prochains objectifs est par exemple la création d’un merchandising commun pour le label.
MF : En plus de ces concerts, nous avons prévu chaque année de réaliser un projet commun entre tous les groupes membres. Le premier projet, en 2019, était celui de la compilation / vinyle / vernissage, réalisé en octobre dernier. On a déjà pas mal d’idées pour le projet commun 2020…
AK : En gros on a plein d’idées toutes plus folles les unes que les autres, mais dans un premier temps, on va voir ce qui est faisable.
MF : Oui, Aria et moi nous avons un rêve secret en commun : trouver une énorme maison dans la région et la retaper pour y arranger un studio d’enregistrement et une salle de concert. Et le must serait même de pouvoir y vivre !
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