[EPIC OPUS N°36] POSIIR

© Sébastien Maeder

Février a beau être un mois plus court, il n’est pas exempt d’EPIC OPUS pour autant. Techno hypnotique et groovy pour ce trente-sixième podcast réalisé par POSIIR. Adepte de techno sobre et de sets techniques, ce membre de Nachtfalter a partagé avec nous ses considérations sur l’évolution de son style et sur sa vision du monde actuel de la techno.

Hello POSIIR, merci pour cet OPUS. Peux-tu te présenter et nous expliquer ton parcours ?

J’ai commencé à mixer en 2015, de l’EDM à la base, avec un pote. On s’est lancé parce que tous les deux on avait tendance à avoir du mal à écouter des sons en entier, donc les mixer nous correspondait bien. On s’est ensuite mis à mixer de la future house, à des anniversaires, à des soirées chez des potes. On a eu notre première vraie date au Rocking Chair quelques mois plus tard, grâce à un coup de bluff où on a réussi à se faire programmer alors qu’on commençait tout juste et qu’on n’avait jamais mixé sur autre chose que des contrôleurs. On a contacté un pote qui avait du matos, il nous a fait un cours, on ne comprenait rien, on a dû tout apprendre en trois heures. Au final on a eu 400 personnes au Rocking Chair, c’était incroyable.

Et tu peux nous en dire plus sur le style de musique que tu mixes actuellement ?

J’ai découvert la techno plus tard, par un ami qui revenait de Berlin. Au début j’ai détesté et progressivement j’ai appris à apprécier ce style. J’ai pas mal évolué au niveau de ce que je mixe. Actuellement j’ai un style assez hypnotique mais assez fast et très groovy. En fait j’ai du mal avec les mélodies et les breaks, donc je n’en mixe pas, je préfère les sets ultra linéaires sans pauses. J’aime bien qu’avec ma musique toute la salle danse et que ça ne s’arrête jamais. C’est un style qu’on peut trouver un peu chiant, un peu snob, mais c’est aussi l’avantage de la techno, c’est qu’il y a plusieurs styles, tout le monde peut y trouver son compte. Au final ce que je mixe, et ce que j’ai fait pour l’OPUS, c’est une vibe qu’on peut retrouver à Zurich, où la techno est inscrite au patrimoine immatériel de l’UNESCO. Là-bas, c’est plus que de la musique, c’est un art à part entière et ça change tout.

Et à côté tu fais partie de Nachtfalter…

Oui, on est un collectif basé à Sion. Je suis arrivé dans ce collectif en 2020, avant je faisais partie de Manareïm, mais je ne m’y retrouvais plus dans le style rave, hardcore, j’étais plus proche de la techno et j’avais envie de faire des clubs. J’ai envoyé un mix à Nachtfalter, il y a eu des bons retours dans le collectif, j’ai été invité à mixer au Cercle pour un closing,  ils ont aimé, on s’est bien entendu et ils m’ont proposé d’intégrer Nachtfalter en tant que DJ résident. Et plus tard j’ai intégré le collectif comme membre, maintenant j’essaie de m’impliquer comme DJ et dans l’organisation. C’est un super collectif parce qu’en Valais il n’y a pas grand-chose niveau event, mais avec Nachtfalter on arrive à faire des soirées avec des gros guests. Et les gens sont toujours au rendez-vous, il y a une ambiance incroyable.

Comment est-ce que tu prépares tes sets ?

Alors je ne les prépare pas, je suis vraiment un mangeur de tracks, j’en passe énormément pendant un set. Il y a un DJ, Oscar Mulero, qui fait ça : il mixe très peu d’artistes, mais beaucoup de tracks de ces mêmes artistes. Et ça m’inspire beaucoup, ça amène pas mal de cohérence. Du coup je prends environ 150 tracks pour 2h, je lance tout dans une playlist, je réécoute, je trie en termes d’intensité, je les classe, et ensuite je pique comme ça dedans pendant le set. Je mixe sur trois platines, donc l’idée c’est de créer de nouveaux sons en mélangeant les tracks. C’est un peu chaud par moment mais c’est ça qui me plait, je suis plus dans la technique que dans la prépa.

Le style techno est en train de devenir un style très populaire un peu partout, tu en penses quoi  ?

Je trouve ça cool mais il y a des choses qui me dérangent un peu. Dans la techno actuelle, je déteste le côté dress code imposé, pour moi c’est censé être un milieu ultra libre, où tu viens comme tu veux, sans jugement. Ça devient dommage que le look soit la condition pour entrer ou non dans un club, au-delà de l’amour de la musique. Il y a des DJ qui refusent de mixer au Berghain par exemple parce qu’ils savent que des fans ne pourront pas rentrer alors que d’autres qui les connaissent à peine seront là juste parce qu’ils ont le look qu’il faut. Et c’est ça qui est toxique dans ce milieu-là et qui me bloque un peu. Il y a une approche un peu hypocrite où il faut avoir l’air « techno », comme public ou comme DJ. Il y a un côté image, très accentué par TikTok, qui est en train de commercialiser la techno, alors que ce n’était vraiment pas le cas avant. Quand j’ai débuté pas grand monde écoutait de la techno dans mon entourage, au final c’était un style très marginal.

Tu l’as dit tu es passé par pas mal de styles, musicalement parlant tu penses encore évoluer ?

Je ne sais pas, mais sincèrement je n’en ai pas envie parce que j’aime beaucoup ce que je mixe en ce moment. C’est un style assez pointu, j’ai aussi trouvé des DJ et des labels qui font ça, je connais bien le milieu. Et de nouveau, pouvoir créer une nouvelle track avec trois tracks, c’est vraiment ma vision de la musique, la définition de mixer. Après je suis conscient que dans certains styles – je prends exemples de l’EBM où il y a des voix par exemple – tu ne peux pas mettre plusieurs tracks en même temps. Mais moi ce que j’aime faire c’est vraiment mixer, je n’ai pas envie d’attendre la fin d’un morceau pour mettre le prochain, donc je suis dans un style qui me correspond vraiment.  Et ça fait plaisir de se trouver musicalement. Maintenant, peu importe où je vais, je ne suis plus vraiment stressé, et je m’amuse. Je commence à savoir comment faire pour que ça marche, je pense que c’est un peu comme apprendre à jouer d’un instrument : au début tu galères à savoir comment ça fonctionne et quand tu comprends et que tu commences à t’amuser, c’est incroyable. Et là c’est ce que je vis maintenant.

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