Pour célébrer la sortie de leur premier album Honey And Groat, le groupe de jazz KUMA investit l’Undertown à Meyrin ce vendredi 14 octobre. EPIC s’est entretenu avec Matthieu Llodra et Arthur Donnot, deux membres du quatuor respectivement pianiste et saxophoniste. On parle de leur formation, du fameux Cully Jazz ainsi que de la scène jazz locale.
Quel est votre parcours musical ?
Arthur Donnot (AD) : J’ai grandi à Lyon, j’ai fait mes études en France jusqu’en 2013, puis j’ai eu envie de partir pour voir autre chose. J’ai alors regardé le profil de plusieurs hautes écoles de musique, et le profil de la HEMU et des professeur·e·s qui y enseignaient m’a plu. J’ai fait le concours d’entrée et ai eu la chance d’être accepté. J’ai fait un Bachelor en jazz et un Master en pédagogie.
Matthieu Llodra (ML) : J’ai grandi à Genève, j’ai commencé par apprendre le piano classique au Conservatoire populaire pendant un moment. Après le collège, je suis entré à la HEMU de Lausanne, mais je n’y ai fait qu’une année. En 2010, je me suis rendu pour la première fois au Cully Jazz Festival en tant que spectateur. J’y ai rencontré le musicien Malcolm Braff, qui gérait l’espace du Caveaux des vignerons, un lieu central au festival. Le Caveau est une salle accessible gratuitement et dans laquelle des jams sont organisées pendant les dix jours que dure le festival. En 2012, Malcolm souhaitait passer le flambeau et nous a proposé au trio (avec Maxence Sibille et Fabien Iannone) de venir reprendre la « résidence » au Caveau. Cela nous a permis de présenter notre musique et de rencontrer plein de musicien·ne·s qui viennent jamer. Parfois, en fin de soirée, les têtes d’affiche du festival viennent au Caveau jouer, et tu te retrouves à jamer avec des grands noms du jazz !
Le Cully Jazz, est-ce un passage obligé quand on étudie le jazz en Suisse romande ?
AD : On m’en a parlé assez rapidement quand je suis arrivé en Suisse. Le Cully Jazz, c’est un rendez-vous incontournable pour nous en termes de musique et de réseau, c’est une plaque tournante locale et internationale pour notre activité. On y rencontre des musicien·ne·s venant de différents endroits du monde. Les gens qui y viennent pour la première fois sont toujours étonnés du magnifique cadre, au bord du lac avec les montagnes.
ML : Ce qu’on apprend à Cully, c’est comment le monde du jazz fonctionne. On entre dans le monde professionnel, on développe son réseau. C’est en ça que le festival est un lieu très important quand tu es étudiant·e en jazz, que cela soit en Suisse ou ailleurs.
C’est là que vous avez formé votre groupe KUMA ?
ML : KUMA est carrément un produit de Cully. Nous tenions la résidence au Caveau des vignerons avec le trio depuis 2012. Arthur s’est présenté pour la première fois en 2015 et nous avons décidé de lui proposer de rejoindre le projet en 2017 sous le nom de KUMA.
« Honey And Groat », qui sort en ce mois d’octobre, est votre premier album. Quelles autres productions aviez-vous faites auparavant ?
ML : On a commencé par sortir trois vidéos de trois morceaux live enregistrés au Motel Campo en février 2019. Puis on a sorti un premier EP éponyme, qu’on a autoproduit sur cassette. En 2020, on a collaboré avec le label Rocafort Records pour produire notre deuxième EP, Kumadé. Et cette semaine on sort notre premier album, Honey And Groat, composé de neuf titres, qu’on présentera à l’Undertown à Meyrin ce vendredi.
Comment s’est déroulée la création de cet album ?
ML : Pour cet album, on voulait que l’écriture soit aussi importante que le son. C’est pour cela qu’on a travaillé avec Valentin Liechti au Suburban Studio, un studio équipé de plein de matériel vintage situé à Winterthur. On a pu passer dix jours à enregistrer et dix autres à mixer, ce qui est rare aujourd’hui pour un album de jazz, tant pour l’enregistrement que pour le mixage. Pour cet album, Arthur et moi-même avons écrit les morceaux et présenté ça à Fabien et Maxence avec qui on a fait tous les arrangements. Valentin nous ensuite aiguillé lors des sessions d’enregistrement. Durant ces vingt jours, on a vraiment pu approfondir notre travail et aller au-delà de ce qu’on espérait.
AD : Au niveau du fond, je dirais que notre écriture a été influencée par le hip-hop et le funk, avec une touche de gospel dans les harmonies. Tout au long de notre processus d’écriture, on s’est questionné sur la manière de concilier la musique instrumentale et improvisée, ce que certain·e·s ont appelé fusion ou d’autres expérimental.
Quel est votre regard sur la scène jazz romande ?
AD : La scène jazz romande est globalement bien active et variée. Cela se remarque avec le nombre d’entrepreneur·euse·s qui créent et expérimentent. Il existe plein de groupes qui portent des projets de qualité, qui font de la musique innovante, mais surtout qui entreprennent des choses, c’est-à-dire qui font des albums, des événements, etc.
ML : Pour compléter ce qu’avance Arthur, je dirais que la scène jazz en Suisse romande est d’une grande richesse et qu’il est assez facile de rencontrer des musicien·ne·s et de participer à plusieurs projets. Les liens entre les scènes jazz en Suisse romande et en Suisse alémanique ne sont pas nombreux. Il y a ce festival « Suisse Diagonales Jazz », qui se tient tous les deux ans et qui consiste en le recrutement de dix groupes suisses pour effectuer une tournée d’une dizaine de dates dans toute la Suisse. Les groupes romands se produisent majoritairement en Suisse alémanique et italienne tandis que les groupes alémaniques et tessinois viennent jouer en Suisse romande.
Vous avez trois morceaux ou albums à recommander : une découverte/nouveauté, un coup de cœur éternel et un joker. Lesquels citeriez-vous ?
ML : Je suis un fan de Louis Cole, il a sorti un single il n’y a même pas deux mois, I’m tight. Ça m’a pris 3 semaines avant de d’arrêter de l’écouter 10 ou 15 fois par jour… Pour le morceau éternel, Rock With You de Michael Jackson, toujours là dans les bons et mauvais moments. Et pour le joker, je suis retombé sur un groupe que j’écoutais pas mal au cycle, Deftones, je dirais Be Quiet And Drive (Far Away).
AD : Alors côté découverte, je suis récemment tombé sur Ellis Regina et son morceau Me Deixa En Paz. Pour le classique des classiques, le groupe Slum Village avec Forth And Back. Et le joker, va pour Justin Bieber et son avant-dernier album Yummy.
Site officiel du groupe : https://kumaquartet.com/
Page Instagram : https://www.instagram.com/kumaquartet/