Claquettes, contrebasse et piano : aller au-delà du jazz

(©Timon Bachmann)

Aujourd’hui, nous retrouvons Daniel Leveillé sur une terrasse ensoleillée aux Grottes. Le jeune danseur professionnel genevois a plusieurs projets en tête, dont son nouveau groupe, le « Daniel Leveillé Trio », qui associe claquettes, piano et contrebasse. Lancé l’année dernière avec Pierre Balda et Cedric Schaerer, le trio joue « du jazz mais pas que » et aimerait explorer d’autres styles de musique au delà des compositions des membres du groupe et des standards de jazz qu’il joue d’habitude.

Présente-nous le groupe en quelques mots.

Pour le moment, le groupe s’appelle « Daniel Leveillé Trio » mais on est toujours à la recherche d’un nom un peu moins « bateau ». Il y a Cedric au piano ou au Fender Rhodes, Pierre à la contrebasse et moi, Daniel, aux percussions et claquettes.

Comment vous êtes-vous rencontrés les trois ?

Je connais Pierre du collège. Cedric, je l’ai rencontré lors de soirées swing pour lesquelles il jouait avec son groupe « Organic Flowers ». Il est actif depuis un moment sur la scène jazz à Genève et a l’habitude de jouer de la musique pour les danseur.euse.s, avec le bon tempo, le rythme juste, les petites impros, etc.

Pour l’anecdote, j’étais sensé jouer avec un pianiste à la Fête de la musique de Genève l’année dernière. Il se trouve que la personne qui faisait le contact avec l’organisation de la Fête s’est trompée de date. On croyait qu’on jouait le vendredi soir, mais en fait, on était programmé pour le samedi soir… On s’en est aperçu en ouvrant le programme le vendredi matin… Le pianiste n’étant pas disponible le samedi, j’ai dû trouver à la hâte un autre pianiste qui pourrait jouer plus ou moins dans le même registre. J’ai appelé tous les pianistes de mon répertoire et je suis tombé sur Cedric, qui était motivé. Avec Pierre, qui était également disponible, on s’est vu le lendemain, on s’est entendu sur les structures, les solos, les impros, etc., sans pouvoir répéter. Finalement, le concert improvisé s’est très bien déroulé et le public a aimé, même si on était bien stressés.

Ce concert était donc la première fois que vous jouiez ensemble ?

Dans cette configuration et avec Cedric, oui. J’avais déjà joué avec Pierre, mais sans formation et à l’arrache : dans la rue, au collège ou lors d’une jam à l’AMR. On est parti d’un projet improvisé, et maintenant on aimerait figer notre répertoire. Depuis l’année dernière et le concert à la Fête de la musique, on a pu explorer les univers de chacun, on a arrangé et écrit quelques morceaux et testé notre programme lors de quelques petits concerts. Avec le retour du public et notre propre expérience, notre but désormais est d’élargir notre répertoire et de travailler sur notre promotion pour se faire programmer dans plus d’endroits.

Tu viens du monde des claquettes, tu écoutais quoi comme type de musique avant d’arriver au jazz ?

Disons qu’en pratiquant les claquettes, tu arrives très vite au jazz. J’ai une préférence pour la période swing, dans les années ’20 à ’50 mais j’écoute et je danse aussi sur du jazz plus moderne et d’autres « styles » de jazz. En dehors du jazz, j’écoute vraiment de tout : hip-hop, rock, reggae, ska, musique classique…

Donc les claquettes sont intimement liées à la musique jazz…

En fait, dès ses origines, l’histoire des claquettes suit celle du jazz ; le déclin en popularité des claquettes va de pair avec le déclin du swing. Quand je parle de déclin du swing, c’est dû principalement à l’arrivée et à la popularité croissante d’autres styles, comme le rock and roll et, plus tard, du disco, du funk etc. À partir des années ‘80/’90, certains claquettistes ont enfin commencé à danser sur des styles de musique qui leur étaient contemporains mais la discipline n’a jamais repris la même ampleur qu’à l’âge d’or du swing. Aujourd’hui, quand tu parles des claquettes, la première image que les gens ont reste le cinéma des années 40 et 50, notamment les films de Fred Astaire.

Ma vision des claquettes est qu’il faut connaître les standards jazz mais aussi ce qui se fait de plus moderne dans le domaine. La force des claquettes est qu’on peut les danser sur presque n’importe quel style de musique, contrairement aux danses « fortes » qui sont rattachées à une musique ou une culture, comme le tango ou le flamenco.

Si les claquettes peuvent se danser sur beaucoup de styles musicaux, pourquoi en entendons-nous aussi peu parler ?

Je pense que c’est parce que cela reste une danse difficile, technique, et donc peu accessible. C’est une danse percussive, donc il faut savoir maîtriser son corps et la musique. Dans d’autres types de danse, maîtriser le rythme n’est pas obligatoire, mais ici tu ne peux pas faire de claquettes si tu ne maîtrises pas la musique.

Revenons-en au Trio, avez-vous envie d’explorer d’autres styles musicaux avec votre formation ?

La mission que nous nous sommes donnée au départ est de ne pas jouer que du jazz, mais de par notre formation (dans les deux sens du terme) – percussions, contrebasse et piano – nous suivons par définition le chemin d’un trio jazz et nos morceaux actuels sont catégorisés comme du jazz. Pourtant, on est déjà arrivé malgré nous à approcher d’autres styles de musique en jouant ensemble. Par ailleurs, on aimerait intégrer des éléments électroniques dans notre musique en utilisant des loopers, des pédales d’effets, un synthétiseur… Je travaille actuellement en collaboration avec l’HEPIA sur un prototype de chaussures électroniques et d’une plaque électronique. J’aurais comme un synthé sous les pieds et mes mouvements produiraient certains sons. Actuellement, nous travaillons sur le trio pour voir jusqu’où nous pouvons aller dans l’expérimentation « technologique » avec cette formation.

Quels autres projets avez-vous en dehors du trio ?

Nous travaillons tous les trois sur plein de projets en même temps comme c’est souvent le cas chez les artistes professionnels. Cedric collabore avec une fanfare aux Grottes (les « Canards des Cropettes »), il est co-créateur du groupe « Organic Flowers » et, tout récemment, d’une fanfare techno (O.U.M.P.H), il joue dans plusieurs ensembles et dirige ses propres groupes (le sextet « Suidi’s » notamment). Pierre fait aussi partie de plein d’ensembles, fixes comme temporaires. Pour ma part, je travaille dans deux compagnies, « STOMP » et la « Martin’s Tap Dance Company », je me produis également en tant que soliste et enseigne à Genève (aux Activités culturelles de l’UNIGE, à l’école de danse « Dance Area ») et à l’étranger lors de stages et de festivals de danse.

Et maintenant, quels sont les prochaines dates de concert ?

Nous avons deux dates qui arrivent prochainement. Le 28 juin nous serons sur la Place du Rhône, dans la programmation de « Jouez, je suis à vous » (pianos dans la rue) et le 28 juillet, nous jouerons à  l’Escale, au bord du lac. Nous présenterons nos nouveaux morceaux, des compositions et des standards arrangés.

(©Timon Bachmann)

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