La situation actuelle met à mal la culture nocturne : fermetures de clubs, annulations de têtes d’affiche étrangères… Pas facile de continuer de faire vivre le monde de la nuit. Et pourtant de nouvelles structures émergent et viennent en soutien aux DJ locaux. On vous parlait l’été passé du collectif Nout et de ses évènements : l’aventure prend un nouveau tournant avec NOUT Agency. Décryptage avec les deux membres Alina Calmac, et Théo Keiflin.
Salut l’équipe ! Qu’est-ce que Nout Agency ?
NOUT AGENCY est une plateforme qui émerge du collectif NOUT, association genevoise fondée en 2019 pour la promotion de l’art et de la musique émergente – qui a pour but de soutenir la création locale et non institutionnelle, de valoriser la collaboration, étant un collectif nomade, ainsi que la mixité des médiums artistiques, des publics et des line-ups, avec un désir d’assurer également cette représentativité au sein de son équipe.
L’idée est ainsi de faire évoluer ce projet, en réunissant un groupe d’artistes musicien·ne·x·s, DJs et producteur·ice·x·s de musique électronique de Suisse romande, et de les représenter sous la bannière de NOUT AGENCY, dans le but de structurer et d’accompagner leur développement artistique dans la région mais aussi dans l’ensemble du pays et, à terme, à l’échelle internationale.
Quel est le but du projet ?
Lors de nos diverses expériences avec le collectif NOUT, nous avons pu remarquer qu’il y avait bien moins de lieux d’expérimentation et de tremplins comme on en avait auparavant à Genève, au sein de la scène alternative ou de la propension des clubs/festivals/salles de concerts à collaborer avec des collectifs et associations locales, ainsi qu’avec les artistes émergents. Il y a comme une difficulté pour eux d’accéder à ces lieux, et on peut parfois sentir un certain manque de renouveau du tissu artistique local, notamment dans le domaine des musiques électroniques. On peut relever des head-liners internationaux et des artistes locaux bookés à répétition, sans qu’il y ait vraiment une attention suffisante portée aux femmes, aux personnes LGBTIQ+, ainsi qu’aux artistes suisses en général, même si on peut quand même constater qu’une minorité œuvre en ce sens. Genève et Zurich, par exemple, restent encore des scènes qui ne sont pas vraiment reliées à l’échelle de notre pays.
Notre « agence » souhaiterait ainsi se proposer d’être comme un intermédiaire de visibilité, avec la volonté de créer des liens entre les artistes, les lieux et les publics, catalyser des opportunités. Le but étant de valoriser les artistes, leurs productions et leurs rémunérations, et espérer ainsi participer au renouveau du tissu culturel local, régional et national.
Alina, d’où t’es venue l’idée ?
Principalement d’échanges avec les artistes eux-mêmes et de ma pratique « de terrain » en tant que programmatrice du collectif NOUT et organisatrice d’événements culturels hors des circuits habituels. En effet, chaque mois, comme nous n’avons pas de lieu à nous, nous prospectons et démarchons les acteur·ice·x·s culturel·le·x·s de la ville pour proposer nos events. Nous avons ainsi pu observer de près les dynamiques et synergies locales actuelles, et il nous semble important de valoriser la relève, et de ressouder les communautés autour de valeurs qui nous sont chères, malgré un contexte exigeant, incertain, et toujours plus réglementé.
Une agence comme celle-ci, ça manque à Genève ?
Il n’y a pas vraiment de structure qui propose ce genre de services pour les artistes de musique électronique, orienté techno, en Suisse romande, comme le serait Adroit à Zurich par exemple, ou de grandes agences internationales, basées à Berlin, telles que Apelago, Triangle ou Thrust. Ceci pour la principale raison que les programmateur·ice·x·s, à l’échelle locale, contactent directement les artistes. Cela se fait de façon assez informelle, sans intermédiaires ; ainsi, passer par un·e agent ou un·e bookeur·euse n’est pas forcément dans les mœurs au sein de notre ville de petite taille.
Aussi, payer une commission supplémentaire à un·e agent, en plus du cachet habituel, peut être dissuasif, mais cela se justifierait pourtant, d’autant plus au vu de la portée régionale du projet, l’idée étant que l’artiste soit libéré de la charge administrative, lui permettant de mettre l’accent sur sa création artistique et de prioriser son temps de production, au lieu de constamment devoir se promouvoir lui-même.
Qu’est-ce que ça apporte aux artistes ?
Les avantages pour les artistes seraient d’avoir une structure qui les représente. Il est notamment parfois difficile d’obtenir des dates, et de se faire remarquer par les organisateurs de soirées, ou d’être rémunéré, car il y a de nombreuses dates « entre ami·e·x » dans la région, ce qui ne justifie pour autant pas zéro cachet, du moment où il y a des bénéfices. Il y aurait aussi un avantage à ne pas tourner que dans les mêmes quelques lieux à Genève, ce qui amènerait une certaine saturation de l’artiste et une lassitude du public. En ayant des dates variées entre les différents lieux et villes, cela stimulerait l’inspiration de l’artiste, en lui offrant toujours plus de perspectives, de collaborations et de visibilité.
Aussi, s’adresser à l’agent, qui est là pour défendre les intérêts de l’artiste, permet à celui-ci de se sentir plus confiant, de potentiellement vivre moins d’expériences désagréables, qui l’améneraient à se décourager (pas d’accueil convenable, pas de communication sur l’événement, non-respect de certaines demandes techniques), où parfois l’artiste s’investit, sans aucune contrepartie. Cela ne veut pas dire que l’artiste jouera désormais qu’en club ou pour des « grandes dates » ; il·elle·x reste accessible, flexible et ouvert aux propositions, mais il aura un accompagnement pour ses objectifs, et un ordre de priorités différent, pour ne pas dire oui à tout, et à tout prix. L’idée de l’agence étant de favoriser des liens bienveillants, soutenant et réciproques entre toutes les parties, pour plus de musique et de fun, de jour comme de nuit !
Vous êtes à la recherche de nouveaux artistes ?
Actuellement, l’agence réunit six artistes, de différents âges, cantons et parcours musicaux : nous avons la chance de commencer cette aventure avec les talentueux·ses·x : Owelle, CTO, Soennichsen K (Genève), Alex Nantaya (Lausanne), Ramon (Neuchâtel) et Rine Ma (Bienne). Le projet est initié par moi-même, Alina Calmac, et l’actuel graphiste du collectif NOUT, Théo Keiflin, qui continue le voyage à mes côtés. Nous nous réjouissons d’avoir un panel d’artistes toujours plus inspirant·e·x·s les un·e·x·s que les autres, tout comme d’avoir pu favoriser une mixité 50/50, pour rester cohérents avec nos valeurs. Nous sommes tous·te·x·s impatient·e·x·s du lancement de ce projet, et vous invitons d’ores et déjà à nos prochains événements : ce samedi 15 janvier au Zoo, avec Soennichsen K, qui jouera aux côtés de la fabuleuse Pelin Vedis et de l’intriguant Raël. Puis le 5 février pour une NOUT ALL STARZ à la Gravière !
Pour suivre le collectif Nout, rendez-vous sur leur page Instagram.
Pour tout savoir sur l’évènement de demain soir au Zoo, c’est par ici.