Léa Pohlhammer incarne la fameuse Violencia Rivas, caricature inventée par deux Argentins en 2009. Elle décide de la faire sienne et propose un duo enflammé qui transforme la scène en 1h15 de rires acharnés sur l’absurdité de notre société contemporaine, aussi paradoxale et violente soit-elle.
Nous nous sommes rendu·e·s samedi soir au Théâtre Saint-Gervais pour découvrir le personnage mythique de Violencia Rivas incarné par Léa Pohlhammer et accompagné de son toutou joué par Adrien Barazzone. Le duo est a découvrir jusqu’au 9 mai et, bien que le spectacle soit complet, il est encore possible de le voir en s’inscrivant une heure avant sur la liste d’attente. Nous revenons sur les raisons qui font de ce show un spectacle que l’on n’oubliera pas de si peu.
Léa Pohlhammer, comédienne née à Santiago au Chili, s’est formée à l’Ecole de Théâtre Serge Martin, et en sort diplômée en 2002. Elle est à l’origine de la conception de Violencia Rivas, en étroite collaboration avec l’équipe artistique. Sur scène, elle est accompagnée du comédien Adrien Barazzone, diplômé de la Manufacture en 2010. À eux deux, ils ont retourné le plateau.
Qui est Violencia Rivas ?
Inventée en 2009 par l’humoriste argentin Diego Capusotto et le scénariste Pedro Saborido pour son émission Peter Capusotto, Violencia Rivas anticipe le Punk dans les années 60 et s’adonne à de fortes critiques sociales à travers ses différents morceaux. Elle s’attaque plus particulièrement aux traditions injustifiées, au consumérisme et plus largement au système capitaliste. Léa Pohlhammer incarne à merveille le personnage dont les traits sont intensifiés par le jeu d’Adrien Barazzone.
Tout est organisé pour que les vices soient poussés à l’extrême et pour renverser les normes de bienséance. À travers un registre trash et comique poussé à l’extrême, le duo fait de ces 1h15 de spectacle une succession de rires inarrêtables. Dans cette pièce, Léa Pohlhammer interprète les morceaux de Violencia Rivas, nous raconte son récit de vie, sans cesse interrompue par ses filles dont elle critiquera les choix professionnels. ¡ Spoiler alert ! Elle nous raconte aussi son expérience où elle a failli mourir après s’être tirée dessus en voulant abattre une mouche. Elle nous détaille l’envolée de son âme vers le paradis où elle a “menacé Dieu pour rendre hommage à Nietzsche”. Bref, de A à Z, le duo nous fait vivre par leur jeu, la mise en scène proposée, l’expérience d’une satire sociale à laquelle on ne s’attendait pas.
Un symbole de résistance qui crie à l’absurdité des sociétés contemporaines
Léa Pohlhammer n’épargne personne ; en incarnant le récit de vie de Violencia Rivas, elle dresse d’importantes critiques satiriques contre le capitalisme et ses plus infimes maillons. Les chansons qu’elle interprète dénoncent l’absurdité de nos modes de vies, des envies et besoins qui nous créent. Elles dénoncent les traditions, critiquent la famille, les différents corps de métier, la mère, les normes de beauté, l’amour. Tout y passe, et on ne se lasse pas de l’écouter chanter ses morceaux comme : « Metete tu cariño en el culo (mets-toi ton chéri dans le cul) » ou encore « Navidad (Mear en la sidra) (Noël, pisser dans le mousseux) », qui sont aussi bruts que nos pensées peuvent parfois l’être. Son chien renforce cet absurde lorsqu’il commente, raconte voire se remue devant sa star. Il nous fait rire et rappelle que nous leur laissons, ce soir-là, les pleins pouvoirs.
Violencia Rivas insulte sans cesse ses filles et prend un malin plaisir à rire de leur complicité avec le système. Elle leur reproche leurs fausses motivations, la manière dont elles s’y prennent ou simplement la position qu’elles occupent. On y découvre différents portraits : la curatrice qui décide ce qui est de l’art ou ne l’est pas, la comédienne qui veut changer le monde mais dont sa seule envie est d’être sur scène et toutes les autres, statisticienne, psychologue, sociologue…
Des coups de théâtre sur coups de théâtre
On pourrait se dire qu’on a atteint le summum… Eh bien non, le duo repousse toutes les limites, s’affranchit de toutes les normes. D’abord, ils nous questionnent nous aussi, privilégié·e·s qui sommes assi·e·s là, à les regarder. Qu’en est-il de nous ? Et enfin, iels réalisent avec brio le lien entre le show de Violencia Rivas et notre réalité genevoise lorsqu’iels ouvrent la porte de la terrasse du 7ème étage du Théâtre Saint-Gervais et brisent la barrière du fictif en utilisant la réalité même qui nous entoure.
Nous en sommes certain·e·s, ce show est à voir absolument ! Qu’il s’agisse de la construction du spectacle, de son contenu, de la manière dont iels nous font rire des absurdités soulevées. Ce spectacle doit être vu, parce qu’il apaise tout autant qu’il donne envie de se révolter.