Un huis clos à fleur de peau : Qui a peur de Virginia Woolf ?

Photo: Samuel Rubio

La critique nous avait tant manqué ! À l’occasion de la réouverture des théâtres, nous nous sommes empressé·e·s d’assister à la première de Qui a peur de Virginia Woolf ? co-produit par le Théâtre du Poche en vieille-ville. Il ne vous reste déjà plus que quelques jours pour découvrir ce classique qui clôture leur saison ce dimanche 25 avril. La réouverture des salles aura permis d’offrir un clap de fin riche et intense à l’équipe qui n’attendait qu’une chose : que le spectacle ait lieu ! Sans vous spoiler, la pièce nous plonge dans un huis clos intense, intemporel et auquel on s’identifie inévitablement, sur fond d’excès d’alcool.

C’est fou, l’idée de répéter, répéter, pour ne pas savoir quand on pourra jouer. Il faut faire preuve de patience, de motivation, de résilience… Un pari qui nous parait réussi, car l’équipe de Qui a peur de Virginia Woolf ? d’Edward Albee, mis en scène par Anne Bisang et co-produit par le Poche, a transmis des émotions très inhabituelles lors de la représentation. Car après 270 jours de fermeture et d’impossibilité de se produire devant un public, leur aisance et leur énergie ont eu un effet tout particulier sur nos esprits en manque de théâtre.

Il est arrivé, ce lundi 19 avril, où la salle affichait complet (du moins, les jauges de capacité) et où l’atmosphère présentait un mélange d’émotion, d’excitation et de chaleur. Les quatre acteur·trice·s, Valeria Bertolotto, Angèle Colas, Jean-Louis Johannides et Guillaume Miramond se révèlent au fil de la pièce dans tous leurs états alors que l’alcool coule à flot. Imaginez deux couples de générations différentes, enfermés, où les tensions montent, les déchirures et les failles apparaissent et se marquent alors qu’ils deviennent de plus en plus ivres. Les corps et les coeurs s’affrontent et se mélangent, et leur sort est inévitablement chaotique.

La force de cette adaptation d’Anne Bisang tient dans les détails. Tout a été pensé dans la mise en scène pour nous faire vivre cette fête qui vire au règlement de comptes comme si nous y étions. Le décor tout d’abord, d’une richesse et d’un réalisme impressionnant, avec lequel les acteur·rice·s jouent avec brio nous permet de nous immerger dans le contexte dès les premières secondes. La musique et les effets de lumière ensuite, qui réhaussent admirablement les temps forts de la pièce. Le jeu des comédien·ne·s enfin, criant de justesse, qui sublime les dialogues aussi drôles qu’incisifs d’Edward Albee.

Cette alchimie entre les acteur·rice·s associée à la qualité de la mise en scène ne nous laisse aucun répit. Nous voilà embarqué·e·s dans une aventure émotionnelle d’une heure quarante où l’on oscille entre éclats de rire et moments d’intense tension. À mesure que, sur scène, les verres se vident et les cigarettes se consument, la catharsis agit. Tandis que la tension monte crescendo et que l’on se dirige inexorablement vers un dénouement que l’on espère libérateur, nous sommes nécessairement amené·e·s à nous interroger sur nos propres réactions et relations. Nous sortons du théâtre comme Georges, Martha, Nick et Honey terminent la pièce, émotionnellement éprouvé·e·s, mais, dans notre cas, pour notre plus grand bonheur.

Qui a peur de Virginia Woolf ? version Anne Bisang est tout simplement exquis, tant par l’aspect hilarant des dialogues que par la vérité des scènes auxquelles on s’identifie, parfois à contrecœur. Dans cette salle étriquée, on pénètre l’intimité des personnages, perçant un décor contemporain parsemé de quelques notes vintage. C’est à la fois moderne et intemporel ! Décidément un retour à la culture aussi mémorable qu’agréable.

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