Bob aka 1000 Balles : la musique comme centre névralgique

© Jennifer Siegrist

Après le portrait de Jonathan Leu, programmateur de la Cave du Bleu Lézard, poursuite de la présentation des acteur∙rice∙x∙s clés du monde culturel alternatif romand. Qu’iels soient dans la musique, le théâtre, les arts visuels… iels ont tou∙x∙te­∙s en commun d’œuvrer à plusieurs niveaux, et de soutenir la création locale en permettant la mise en lumière d’autres artistes. Pour ce deuxième article, présentation de Bob, alias 1000 Balles, hyperactive du domaine de la musique, que l’on retrouve derrière le label Kakakids, à la programmation de festivals et salles genevoises ou encore au synthé dans le groupe Maraudeur.

Qu’on la connaisse sous le nom de Bob dans la vie culturelle genevoise, comme 1000 Balles lors de ses « passages de disque », ou encore sous son réel patronyme presque effacé par ses diverses identités, la présence de Jennifer Siegrist à un évènement musical est bien souvent un gage de qualité. Bob fait partie de ces incontournables acteur∙rice∙x∙s du monde de la nuit qui, bien loin de se contenter de la richesse du milieu musical local, en sont aussi les instigateur∙rice∙x∙s. Aussi discrète que proactive, on a voulu en savoir plus sur ses multiples casquettes.

En fait, je ne me suis jamais posée en me disant : « Ah tiens, je vais me lancer dans l’organisation de concerts ». Ça s’est fait petit à petit, très naturellement.

Kakakids Records

Si on la connaît principalement pour son implication dans le monde musical romand, c’est par le cinéma que Bob a débuté : « À la base, j’ai commencé à organiser des concerts pendant mes études en histoire du cinéma à Lausanne. Je faisais partie d’un collectif qui s’appelle « Où êtes-vous toutes ? » avec lequel nous avons organisé beaucoup d’événements dans des caves, maisons ou en forêt. C’est après, en déménageant à Genève, que j’ai rencontré Antonio et William avec qui on gère maintenant Kakakids. On a commencé à organiser des concerts ensemble, principalement à l’Ecurie. »Kakakids Records donc, lancé à la base pour formaliser des activités d’organisation de concerts, et qui, progressivement, a pris des allures de label : « En fait à l’origine on ne s’est pas dit qu’on allait faire un label, ça n’a jamais été prévu comme quelque chose qui allait marcher, on a juste commencé naturellement à sortir des disques et des cassettes. Là où ça a pris de l’ampleur, c’est quand on a sorti Maria Violenza, son premier EP en 2018 puis un LP en 2019. On ne s’attendait pas à autant de succès. »Maria Violenza d’abord, qui sera suivie par d’autres artistes comme Krinator annoncée en 2024 ou encore Dadalú, artiste chilienne qui vient de rejoindre le label et que l’on retrouvera au Rez-Usine pour un vernissage au mois de mai. « L’idée derrière Kakakids, c’est surtout de collaborer avec des ami∙e∙x∙s, des gens dont on aime la musique mais avec qui on a des affinités, c’est une sorte de famille. On n’a pas non plus un calendrier fixe, précis, car on gère le label en parallèle de nos autres activités. »

Programmation musicale

Parce que s’occuper d’un label qui fait les beaux jours de la scène post-punk, c’est très loin d’être suffisant pour Bob. À la fin de ses études, elle commence à travailler pour des festivals de cinéma bien connus en Suisse romande : « Je fais des mandats dans des festivals de films, principalement au Black Movie. Actuellement, je suis aussi impliquée à La Bâtie, en coordination éditoriale. » De la musique et du ciné donc. Mais surtout de la musique quand même, puisque l’une de ses activités principales demeure la programmation : « En 2016, suite à l’organisation de plusieurs concerts, j’ai rejoint le collectif de l’Ecurie afin de travailler sur la gestion globale du lieu allant de la programmation aux commandes du bar. Concernant les concerts, c’est intéressant car c’est une salle qui reçoit beaucoup de demandes externes et, comme L’Ecurie a aussi un côté social important, il n’y a pas que le côté musical qui compte. On programme aussi parce qu’on trouve que c’est un projet chouette. Cela permet d’avoir des styles variés et mettre en avant les artistes émergent∙e∙x∙s de la région. Sous l’entête 1000 Balles, je fais des progs dans l’esthétique de ce qu’on fait avec Kakakids dans une orientation plus synthétique, post-punk, voire dub. »

© Jennifer Siegrist

Niveau musique, on retrouve également Bob du côté du magasin de disques chez Bongo Joe, dans l’équipe de programmation musique au LUFF ou encore à l’organisation du mythique festival Face Z, « initialement un projet de Vincent Bertholet. Maintenant, on travaille en collectif, on est beaucoup entre potes aussi, c’est assez organique comme manière de fonctionner. On est tou∙te∙x∙s impliqué·e∙x∙s à la programmation, et pour les choses plus pratiques, on a tou∙te∙x∙s des domaines, moi c’est plutôt la comm’. Pour Face Z, on essaie de ne pas être figé dans un style de musique particulier mais de rester éclectique dans la programmation, sans pour autant avoir de « têtes d’affiches ». On va autant vers des choses un peu plus expérimentales ou plus calmes dans le Salon d’hiver que vers des projets plus accessibles ou dansants au Pneu. »

1000 Balles : passages de disques et synthés

Forcément, on ne peut pas être aussi impliquée dans la musique sans passer un jour ou l’autre derrière les platines. Pour Bob, qui mixe donc sous le nom de 1000 Balles, cela s’est fait assez naturellement : « Le côté DJ set est venu un peu par hasard. J’ai commencé sur le tas. En organisant des concerts, je passais un peu de la musique entre les lives, surtout à la Cave 12. J’ai commencé en 2017 mais c’est surtout après le COVID que j’ai eu plus de propositions et cette activité s’est pas mal développée. Mais je me considère plus comme music selector que comme DJ, parce que je ne suis pas très technique. » Mais au-delà de mettre Shazam en échec à chacun de ses sets, Bob ne se contente pas des platines quand il s’agit de faire de la musique : « Je fais aussi partie de Maraudeur. C’est récent, depuis l’année dernière, je joue du synthé dans le groupe. Cela fait pas mal d’années que je bidouille des synthés dans ma chambre mais j’ai de la peine à finir un projet, donc là d’intégrer un groupe qui existe c’est plus facile. On vient de faire une date à l’Alhambra pour Antigel, c’était étrange de jouer dans une si grosse salle. »

Scène locale

Pour Bob, qui ne se limite pas à un seul genre musical, que ce soit pour mixer ou dans ses programmations parce qu’elle « trouve un peu chiant d’écouter toujours la même chose » et préfère « passer partout et graviter autour de plusieurs styles de musique », Genève permet l’ouverture musicale du fait de la richesse de l’offre : « On a la chance ici d’avoir un grand nombre de salles par rapport à la taille de la ville. Il y a vraiment plein de choses qui sont chouettes. En termes de programmation, pas forcément locale, mais de manière générale, il y a beaucoup de variété, surtout dans la diversité des lieux. Par exemple avoir la Cave12, c’est assez fou. C’est un modèle de salle que tu retrouves très peu ailleurs. Concernant la scène locale, cela dépend des styles de musique, par exemple le hip-hop je trouve que la scène est assez florissante, alors que la scène post-punk, j’ai l’impression qu’il y a moins que dans d’autres villes où ce genre de musique est beaucoup plus développé au niveau local. »

Alors avec autant d’activités, quand on demande à Bob vers quoi elle se dirige à l’avenir, on comprend surtout qu’on n’a pas fini de la croiser en concert : « C’estdur de dire où je veux mettre la priorité, mais ce qui est sûr c’est que j’aime vraiment bien faire de la programmation. Et de toute manière pour le moment je suis contente d’avoir autant d’activités différentes. On verra sur le long terme, mais là ça me va bien comme ça. »



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