Derniers jours pour l’expo « Ceux qui font face »

Davide-Christelle Sanvee, sous le regard de l'illustre Charles Bonnet ©MarieBrocher

Si on connait déjà bien Davide-Christelle Sanvee pour son travail de performance, on peut découvrir jusqu’au 17 décembre ses œuvres plastiques au Palais de l’Athénée.

Une commission de la Société des Arts

Depuis plus de 45 ans, la Société des Arts (SdA) organise régulièrement des expositions dans la Salle Crosnier du Palais de l’Athénée avec la volonté de promouvoir la jeune création genevoise. C’est dans ce cadre que Davide-Christelle a été contactée par l’institution à l’hiver dernier. « Au début, je n’ai pas très bien réalisé ce que représentait la SdA, ce n’est que petit à petit que j’ai compris que c’était quelque chose de reconnu à Genève. »

Pour être en mesure de créer ses œuvres et de se consacrer à son exposition, la SdA lui a versé un cachet de 1’500 francs, et un budget de production de 3’000 francs. Comme l’explique Étienne Lachat, secrétaire général de la société, « c’est une nouveauté, ce cachet en plus du budget de production est le fruit d’une prise de conscience à propos de la rémunération des artiste·x·s plasticien·ne·x·s : payer les musicien·ne·x·s était déjà une évidence, alors pourquoi ne pas offrir le même traitement aux autres ? » Cette réflexion est au cœur d’un projet plus vaste pour le développement des activités de cette institution qui fêtera en 2026 ses 250 ans.

Exposer les fantômes de l’Athénée

L’œuvre de Davide-Christelle est traversée par plusieurs sujets politiques comme la place des personnes racisées dans l’espace public en Suisse. Pour articuler sa pensée, elle part toujours du contexte concret de création et de représentation. La première étape est donc une recherche ; en faisant le tour du bâtiment qui abrite la Société des Arts, elle s’intéresse aux bustes qui ornent sa façade et aux histoires qui se cachent derrière ses visages.

« La personnalité de Charles Bonnet m’a tout de suite intéressée. À peu près inconnue du grand public, il a donné son nom à un syndrôme provoquant des hallucinations. Cela faisait écho à mon expérience dans le palais. Le soir, la nuit tombée, dans ce grand bâtiment, les ombres et les bruits semblent prendre vie. »

La Vénus hottentote, sous le regard stupéfait de trois hommes © MarieBrocher

Une absence omniprésente

Les personnes qui ont assisté au vernissage de l’exposition ont eu l’opportunité de voir Davide-Christelle Sanvee présenter une performance inédite, qu’il sera encore possible de voir le mardi 6 décembre à 18h30. « C’est pour moi l’occasion de dire tout ce que je n’avais pas eu le temps de dire avec mes œuvres. » Seul souvenir de ce moment, une toile sur un chevalet – élément absent du plan de l’exposition. Y est représentée la Vénus hottentote, une femme noire originaire d’Afrique du Sud, morte en 1815 à Paris, après avoir été mise en esclavage et exhibée à travers l’Europe pour exciter la fascination raciste que provoquait son corps. Elle tourne le dos à trois hommes blancs vieillissants, perruqués et ébahis par la stéatopygie de cette femme.

Tout au long de la performance on voit à plusieurs moment Davide-Christelle peindre et retoucher cette toile que le public ne peut pas voir. Elle annonce vouloir représenter la foule présente, en train de l’observer, et déclame à plusieurs reprise : « Je m’expose ». En 2019, lorsqu’elle reçoit le Prix suisse de la performance, le jury écrit dans son compte-rendu : « De façon presque absurde, mais définie et réfléchie, elle donne avec humour un aperçu de thèmes complexes. » Cet humour est central dans la performance de l’artiste. Le public est poussé au rire ; dans cette ambiance de détente les critiques contenues dans le discours de Davide-Christelle sont pleinement reçues.

Davide-Christelle devant la porte du Palais de l’Athénée ©MarieBrocher

Une artiste à suivre

Après son exposition au Palais de l’Athénée on pourra retrouver Davide-Christelle dans tout un ensemble de projets.

Tout d’abord, elle vient de rejoindre la Compagnie Dans Le Ventre de Rebecca Chaillon, où on pourra la voir à l’affiche des prochaines représentations de Carte Noire Nommée Désir – un des meilleurs spectacles que l’on a pu voir cette année à La Bâtie. La pièce tournera l’année prochaine en France et en Belgique, avec une date suisse en mars 2023 à La Chaux-de-Fonds.

En mars, elle présentera sa première pièce au Théâtre de l’Usine. Une réflexion sur l’espace de la scène, et la place des personnes noires sur celle-ci. Au printemps, elle rejouera Concours de larmes en mai au Grütli, une très belle création coproduite par le T.U. Enfin, on devrait la retrouver pour la prochaine édition de La Bâtie. Elle y présentera une nouvelle création : Aime ton pays, dont la première avait été annulée cette année.

À suivre sur Instagram : @davide_christelle

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