Alors qu’il court entre Genève et Bâle pour son Master, nous arrivons tout de même à boire une bière avec Gaspard Sommer, le musicien au talent 100% genevois à l’occasion de la sortie de son album.
Pour commencer peux-tu te présenter en tant qu’artiste ?
Disons que je suis un artiste genevois qui essaie de faire le maximum de projets: je chante, je joue du piano/clavier, je compose surtout et je produis de la musique. C’est ça qui est l’élément principal: je compose, je produis et je suis interprète de mes morceaux. Je fais tout sur mes projets persos mais après je collabore aussi avec d’autres gens en mode featuring guest soit en chantant, soit en faisant de la prod et en amenant ma touche…
Quand as-tu commencé à faire de la musique ?
J’ai commencé par la batterie quand j’étais gamin, à 2, 3 ans, parce que mon père était batteur de jazz avant. J’en ai fait pendant 10 ans et après à 13, 14 ans j’ai switché en faisant du rap avec mon cousin et c’est là que j’ai eu envie de produire ma musique. Là du coup j’ai eu un ordinateur, un petit clavier, mon micro et c’était parti ! J’avais jamais fait de piano de ma vie mais par la suite j’ai voulu aller un peu plus loin. J’ai pris des cours de piano jazz et aussi des cours de chant pendant 2 ans. À 18 ans j’ai commencé le conservatoire à Genève en chant, il y avait une filière pré-professionnelle entre le conservatoire et l’AMR et pendant 4 ans j’ai eu des ateliers, des cours de compo, de chant, de piano… À partir de ce moment là je ne faisais que de la musique: tous les jours je faisais ça et du coup je suis parti à Lausanne pour faire un bachelor à l’HEMU pour m’immerger à fond. Et là je commence un master à Bâle ! Bon là c’est vraiment le cursus académique mais après il y a tous les trucs que j’ai fait à côté.
Quand ont commencé tes projets perso ?
Mon premier projet s’appelait Nebula en 2012, c’était un projet avec 16 morceaux, tout produit par moi. Je chantais moins par contre il y avait plus d’invités mais à ce moment je ne comprenais pas grand chose à ce que je faisais… les harmonies, les accords, je faisais tout d’oreille. Quand je le réécoute maintenant je trouve ça très gentil, c’était il y a maintenant 5 ans. Je suis toujours très content de ce projet mais pour moi c’est de l’histoire ancienne ! Après il y a eu un groupe qui s’appelait The Mobius et ensuite Looping avec le Dj La Pièce on a fait un album les deux il y a 1 an et demi. Mon projet qui sort maintenant c’est le deuxième projet perso.
Raconte-nous l’histoire de cet album, Out For A Run…
J’ai travaillé environ 1 an dessus, bien sûr pas à plein temps. Il y a un des morceaux qui est plus vieux que les autres que j’ai réutilisé, Swordfish. J’avais toujours voulu mettre une partie rap dessus sauf que j’avais pas envie de la faire moi, du coup j’ai demandé à Rico TK. En fait je l’ai rencontré quand je faisais les Jam du Chat Noir, j’étais au clavier, je faisais partie du band. Du coup j’ai vu ce qu’il avait déjà fait avant, il est dans SuperWak. Mais il est assez discret. C’était de l’anglais donc ça m’a plu et puis j’aimais bien ce flow hyper posé, hyper chill. Il me fait un peu penser à Isaiah Rashad, il a un truc un peu nonchalant et je trouvais que ça marchait bien avec mon univers.
Pour l’album j’ai essayé de faire une longue suite. L’album fait 25 minutes. Le nom c’est parce que j’avais envie de trouver quelque chose qui symbolise, évoque le fil rouge de l’album. Et même si je cours absolument jamais de ma vie, c’était le truc de sortir, faire une balade, une sorte de continuité… (rires)
Je raconte une sorte d’histoire même si c’est assez abstrait. Mais on retrouve souvent les mêmes éléments dans les morceaux, que ce soit un rythme de batterie, des paroles presque les mêmes qui parfois changent à peine, ou même une mélodie… L’idée c’était que tout ait un sens, c’est pas juste 8 morceaux qui ont rien à voir ensemble. Il faut clairement l’écouter dans l’ordre.
Quels sont les thèmes de tes chansons, de quoi parlent-elle ?
Dans ce délire de retrouver certains éléments dans chaque morceau il y a en fait l’histoire d’une sorte de rencontre. Au début de l’album j’évoque le fait de vouloir aller vers quelqu’un, ensuite vers le milieu je parle de quand on est ensemble, et à la fin du fait que ça va pas et puis que je lâche prise, je vais ailleurs… C’est ça aussi la continuité de l’album. On retrouve beaucoup aussi le thème de l’eau. Le tout premier projet que j’avais fait c’était Nebula donc l’espace et puis là maintenant c’est l’eau. En fait j’aime bien me donner un thème et essayer de m’y coller. Mais l’eau ça m’inspire parce que c’est un univers que je ne connais pas, il y a un truc qui est assez fascinant dans l’univers marin et on n’y connait rien. Quand on est dans l’eau on entend rien, enfin bref c’est un autre univers !
Quel est ton morceau préféré de l’album ?
Like Memories c’est le single qu’on a choisi parce qu’il passe bien mais je l’avais déjà sorti en live avec l’émission Balcony TV. J’avais aussi hésité avec Swordfish ou Kid. Je suis assez content de Kid dans son évolution, celui-là il a une grosse progression, il est de plus en plus intense. Lui pourrait être un de mes préférés. J’aime beaucoup aussi le premier qui est une sorte d’introduction, Preliminary, là aussi il y a une sorte de double sens. À la fois c’est l’intro de l’album mais je parle aussi de la rencontre.
Pourquoi chantes-tu en anglais ?
Je n’écoute que de la musique anglophone. Je me rends compte que c’est hyper rare que j’écoute des paroles en français. Le Hip Hop français j’écoute pas vraiment à part Lomepal, Jazzy Bazz ou même les gars de SuperWak mais de manière générale, ça me parle moins… Niveau production et son aux States ou au Canada c’est de la folie. Là j’écoute en boucle l’album de Daniel Caesar, je pète un câble ! La production est parfaite.
De quels artistes t’es tu donc inspiré pour ton album ?
J’écoutais James Blake clairement, ça reste une grosse inspiration je vais pas le cacher et je pense que ça s’entend (rires). Après sinon je dirais que j’écoutais Anderson Paak. qui a aussi ce mélange entre instruments acoustiques et électroniques et c’est super bien fait. L’album de Solange, A Seat at the Table, Childish Gambino le dernier album. Mes influences sont hyper Hip Hop mais sinon il y a aussi Lone, artiste anglais qui ne fait pas de Hip Hop. Après j’ai aussi utilisé toutes mes connaissances de mon background jazz par exemple, parce que j’adore ça même si j’en joue plus vraiment, et après tout ce qui est neo soul, l’album de Kendrick (To Pimp A Butterfly) et D’Angelo, le dernier. J’ai essayé de faire un peu pareil en mélangeant acoustique et électronique. J’ai un pote qui joue de la batterie acoustique sur 4 morceaux, c’est Léonard Juston et après il y a des synthés, des guitares (Pierrick Begnaud), un piano… dans le morceau Boring Man y a pas grand chose mais il y a ce mélange acoustique et electro.
Du monde a collaboré sur cet album, peux-tu nous en parler un peu ?
Y a pas mal de boulot justement du batteur Léonard Juston. C’est un bon pote de l’école et c’est aussi le batteur de Danitsa. Le guitariste c’est pareil, on a un bon feeling. Le pianiste, Marino il a un groupe de techno live qui s’appelle Erkalium, j’avais joué avec lui aussi une fois. Après il y a Danitsa qui est là sur 2 morceaux, elle fait des ambiances de voix surtout, sur Like Memories et sur Ultralude. Après le featuring avec Rico dont j’ai parlé, il est mis en avant plus que les autres parce qu’il fait vraiment sa partie à lui. Après Idle qui est aussi d’EICA qui m’a filé un coup de main sur la prod du morceau Kid.
Like Memories a été clippé, maintenant aimerais-tu clipper d’autres morceaux de l’album ?
J’aimerais bien pour Swordfish mais à voir. Pour Like Memories il y a certains éléments d’eau. Le morceau est en deux parties: la première partie je suis filmé en reflet, on me voit avec mon visage qui se déforme avec des gouttes d’eau. La pochette de l’album a été faite par Sylvain Gelewski qui est le co-fondateur d’EICA et il a peint la cover de l’album. Le mec qui a fait le clip a pris des photos et des vidéos de la toile en y insérant ma tête, on voit un peu les deux quoi. Dans la deuxième partie du morceau ça change de couleur, passant du bleu au rouge et on voit double, triple, à l’envers et à l’endroit. Ça change d’univers ! Pour un prochain clip je suis pas sûr de faire un truc avec de l’eau. Je suis hyper fan de Wes Anderson pour la symétrie et le carré et des frères Cohen pour le ton de l’humour mais c’est vrai qu’en général je fais confiance pour mes clip, je compte sur les réalisateurs. Typiquement pour Like Memories j’ai donné deux ou trois mots clés et c’est Sam Maryu qui s’en est chargé.
Comment se procurer ton album ?
L’album est sorti le 20 septembre. Il est surtout disponible ICI sur Bandcamp parce que les gens peuvent donner plus que le prix initial s’ils le souhaitent. Il est aussi sur Itunes, Spotify, Deezer… Il est sorti sous le label EICA Records. On va peut-être en presser, j’aimerais quand même avoir l’objet. À la base je voulais faire des vinyles mais c’était pas possible.
Demain soir, le samedi 23 je joue mon album à l’Abri, c’est le vernissage de l’album, et la semaine d’après le samedi 30 je serai au Terreau pour la soirée EICA et Cheptel. Mon but ce serait d’arranger avec des musiciens pour jouer avec un vrai groupe et donc jouer l’album en live, c’est peut-être ça l’avenir de l’album !
Gaspard jouera donc son album le 23 et 30 septembre à l’Abri et à la salle du Terreau.
23 septembre: l’Abri, espace culturel pour jeunes talents, 21h, entrée libre.
30 septembre: Salle du Terreau, 20h, 10chf.