Du nouveau dans le rap genevois. Rencontre avec Les Invertébrés.

© Antonio Cameira

Rencontre avec Les Invertébrés, groupe émergeant de rap genevois, pour parler de leur mixtape « Eaux-Vives », mais pas que…

Tout a commencé il y a environ quatre ans pendant une soirée entre potes. Fervents de rap, ils s’amusent à écrire des textes « au bol » sur des instrus trouvées sur internet. L’expérience leur plaît, ils continuent. Au fil des soirées, des rencontres et des freestyle dans des caves, Les Invertébrés se déploient.

Aujourd’hui, le groupe se forme officiellement de quatre MC, chacun avec leur pseudonyme: Nibli, La Salsa Laide, Jim le Maigre, Retroski, toujours accompagnés de leur fidèle beatmaker, Idle. Durant ces dernières années, ils ont eu l’opportunité de faire plusieurs concerts, notamment au Terreau, à la Parfumerie et Urgence Disk. On retrouve de manière générale dans leur esthétique et dans leur musique une touche d’absurdité et de « je-m’en-foutisme ». Des Invertébrés, émane une énergie brute et une attitude qui évoquent le groupe de rap américain Beastie Boys. Ils ne se prennent pas trop au sérieux, mais soulignent qu’ils ne sont pas un « groupe comique ».

Ce début d’année 2018 a été d’autant plus marquant avec la création de leur premier clip officiel « Ville Haine » et une première mixtape, « Eaux-Vives », sorti sur le label SOM SQUAD Records. « Eaux-Vives » fait référence au quartier genevois du même nom où se trouvait leur local de musique à l’époque, lieu symbolique de  rencontre et de création, marquant les débuts du groupe. Le sens littéral du titre leur plaisait beaucoup aussi: « les eaux fraîches » évoque Nibli, en référence à ce premier résultat concret de leur travail.

En ce qui concerne la création des morceaux de la mixtape, Les Invertébrés n’ont pas écrit ensemble mais ont travaillé en « format de collage » : chacun a amené des vieux textes personnels, et ils ont ensuite décidé  de quelle manière les associer les uns aux autres, tel un « patchwork ». Même processus de travail avec Idle, le beatmaker, qui est arrivé avec ses propres instrus. Ils ont alors travaillé autour de tout ce matériel pour chercher des ambiances et univers communs, et non des thématiques précises. Ils me donnent en exemple le morceau « Ville Haine », pour lequel ils n’ont pas cherché à décrire un lieu tel quel mais plutôt à en dégager l’atmosphère, avec une idée de déplacement et d’évasion.

À l’écoute des différents morceaux, on distingue chaque MC par son style d’écriture et flow très personnel. Nibli et La Salsa Laide ont tendance à avoir une « conception plastique du texte » m’expliquent-ils, jouant sur les assonances, rythmes et textures des mots. Jim le Maigre de son côté, aborde le texte de manière plus directe. Il est le conteur du groupe. Les autres membres prennent la parole pour Retroski qui n’est malheureusement pas présent durant notre rencontre. Ils définissent son style d’écriture comme quelque chose qui se rattache à la construction technique des mots plutôt qu’à leur signification. Sa formation de musicien jazz oriente son rap; on y retrouve des qualités telles que l’ improvisation et un sens de la liberté.

Dans leurs influences communes; le rappeur français Nepal, Odezenne, pour leur« capacité de se détacher du rap français, tout en proposant du rap et quelque chose de très musical », mais aussi Kendrick Lamar.

Du côté des instrus,  le beatmaker Idle, ne vient pas du hip hop à la base mais a toujours fait de la musique en tous genres- trip hop, punk, reggae… Il s’intéresse au beatmaking depuis un moment, et la rencontre avec Les Invertébrés a concrétisé ses envies. C’était aussi une occasion pour lui  de se distancier d’une musique plus « chill et mélaconique » de ses projets solo, pour créer des morceaux plus « punchy ». Il m’explique qu’avec l’évolution du hiphop, le beatmaking est devenu un art en soi. L’instrumental n’est plus là pour simplement « servir » les rappeurs, mais a autant d’importance que les textes. Ses influences: des beatmakers / rappers de Los Angeles tels que Flying Lotus, Samiyam, Dibiase, Jon Wayne, mais aussi « l’abstract hiphop  à l’ancienne», avec des artistes tels que Dj Krush et Dj Vadim.

Fiers de leur mixtape, “Eaux-Vives” représente pour eux  la volonté de mettre leurs vieux textes « au propre », de les sortir, de les poser, pour maintenant passer à de nouveaux projets.

En effet, des projets pour la suite, il y en a: Orbe Turquoise, projet parallèle, constitué de Nibli et la Salsa Laide, qui viennent de sortir un nouveau clip, “Sachet Bleu”.  Pour Les Invertébrés, il y a la volonté de continuer à créer, à expérimenter, et notamment de s’ouvrir à d’autres genres musicaux tels que la house et le footwork.

Prochains concerts:

Orbe Turquoise: 24 mai- Shuriken Fuma-Som Squad Release Party, Zoo, Usine, Genève.

Les Invertébrés: 26 mai- Prémices Festival, Lausanne

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