Quête de l’humain au coeur du Chaos

Du 5 au 24 octobre prochain, la scène du Théâtre Pitoëff accueillera sur ses planches les acteur·rice·x·s de la pièce Chaos, écrite et mise en scène par Valentine Sergo. Chaos raconte l’histoire d’Hayat, une jeune femme qui fuit une zone de guerre et ses traumatismes pour commencer une nouvelle vie en Europe. Rencontre avec l’auteure.

« Comment se reconstruire quand on a vécu le pire ? » Une question simple et tranchante, et le fil conducteur de Chaos. C’est au milieu des années 2010, après plusieurs voyages en Palestine, que Valentine Sergo a commencé à réfléchir à la possibilité d’écrire, à imaginer les premières scènes de sa pièce. Au fil des rencontres, des destins cassés, des récits de vie aussi dramatiques qu’inspirants, le personnage d’Hayat a pris forme sous sa plume. Un personnage mosaïque qui donne voix à des femmes fortes, des femmes qui ont vécu l’horreur et qui avancent désormais coûte que coûte, tracent leur chemin dans l’obscurité en quête d’un mieux, à la recherche de sérénité et d’humanité. Une reconnexion avec la vie qui, l’auteure en est convaincue, passe par l’amour et l’empathie : « Quand on se sent aimé, même un tout petit peu, on peut recommencer à vivre. »

Écrire sur un conflit complexe où tout a déjà été dit 

« Plus je partais en Palestine, plus je me rendais compte que je ne savais rien. J’ai compris que je ne pouvais pas comprendre. » Pas comprendre la guerre israélo-palestinienne, septante ans de conflit armé et idéologique qui ont fait l’objet de nombreuses analyses et documentaires, mais qui dépassent le cadre de la rationalité et de l’intellect. « J’ai décidé de raconter le parcours d’une femme du point de vue de l’intime avec la guerre en périphérie. Parfois on la devine, parfois elle fait irruption dans le quotidien », explique Valentine Sergo. Elle imagine ainsi Chaos, une pièce qui n’a pas vocation à traduire la réalité, une vérité objective, mais qui prend racine au carrefour de plusieurs sensibilités et subjectivités, celles de femmes qui racontent et celles de l’auteure qui écrit. Une pièce qui est également portée par le puissant jeu d’acteur de ses quatre comédien·ne·x·s : Anne-Shlomit Deonna, Wissam Arbache, Nasma Moutaouakil et Bastien Blanchard, qui se partagent vingt personnages et emmènent les spectateurs pendant 2h30 dans un univers où les temporalités se superposent, où la réalité côtoie l’onirisme et où le politique laisse place à la grâce : « La politique a besoin de rêve. » 

Cie Uranus © Isabelle Meister

Une relation fusionnelle et durable

« Le théâtre, c’est ma plus grande histoire d’amour. » Alors tout juste âgée de dix ans, Valentine Sergo assiste à une des représentations du célébrissime Songe d’une nuit d’été de William Shakespeare. C’est le coup de foudre. Le plus beau et le plus vrai de tous, le coup de foudre artistique. C’est le début d’une longue aventure avec le théâtre, une idylle qui dure maintenant depuis plus de quarante ans. Des paillettes et du rêve à l’engagement social et politique, le rapport de Valentine Sergo à la scène a évolué, mais la passion est restée intacte : « À dix ans, j’ai su que c’est “ça” que je voulais faire plus tard » et à cinquante-deux ans, c’est toujours « ça » qu’elle fait. Plus que toutes les autres formes d’expression, « le théâtre est au croisement de tous les arts ». Musique, écriture, rhétorique, éclairage, danse, dessin, le théâtre est l’art du collectif, de la rencontre. Chaos comme toutes les autres pièces a nécessité le travail de nombreuses personnes et parce que l’auteure l’a expressément demandé, voici un hommage à tou·te·x·s ces acteur·trice·x·s de l’ombre :

Fanny Pelichet à l’assistanat et à la scénographie, Rita Freda à la dramaturgie, Roland Bucher et Bager Şen à la création sonore et musique, Claire Firmann à la lumière, Jozsef Trefeli à la chorégraphie, Samantha Landragin aux costumes, Chantal Noirjean à l’administration, Célian Cordt-Moller aux graphismes et Christine Anthonioz-Blanc, Anne Wyrsh et Latcheen Maslamani. 

« Le théâtre est magique : tout le monde sait que c’est faux et pourtant on rentre dans le vrai », déclare Valentine Sergo. Hayat a beau être un personnage de fiction, un personnage qui n’existe pas, elle prend vie sur les planches et devient le porte-parole de femmes qui, elles, existent bel et bien et qui n’auront peut-être jamais plus l’occasion de raconter leur chaos.

Réservez vos places sur le site de la Compagnie Uranus.

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