La Galerie expose du computer art

Après une première exposition sur le digital dans l’art au sein de l’Université de Genève, et une deuxième au salon de tatouage « 33 tours » qui portait sur l’altération d’images tirées de dessins animés, Julien Grünhagel présente dès mardi un partie de son travail à la Galerie, aux Grottes. Cette exposition, intitulée « Order and Coahs » comporte deux séries d’œuvres imprimées, l’une utilisant la technique du glitch art, l’autre du generative art, ainsi qu’une vidéo et une œuvre interactive. Venez découvrir cet art encore peu connu du grand public dans une atmosphère conviviale et accessible à tout.e.s.

L’exposition a lieu du 5 au 29 avril. La galerie est ouverte du mardi au samedi de 19h à minuit. Il est possible aussi de prendre rendez-vous pour une visite en dehors de ces horaires en envoyant un mail à expo.lagalerie@gmail.com .

Le computer art c’est quoi ?

Le computer art consiste à faire de l’art avec son ordinateur, soit en s’aidant de lui pour créer des œuvres, soit en le programmant pour qu’il en fasse lui-même. Personnellement, je suis deux courants principaux dans le computer art : le glitch et le generative art.

Le glitch a pour concept de détruire une image par divers moyens. J’utilise notamment une méthode qui s’appelle audiobending. Je fais passer des images ou des vidéos dans des logiciels de son, j’applique un effet sonore (ex. : réverb’, écho) et je réexporte le tout, ce qui reconstruit l’image avec un rendu différent.

Une deuxième méthode, le databending, consiste à modifier directement les données du fichier dans un éditeur de texte. J’ai l’image sous forme textuelle, et je choisis plus ou moins arbitrairement de remplacer tous les « A » par des « E » par exemple, ce qui va modifier mon image. Cette méthode peut être utilisée de manières très variées et dépend à la fois des caractères modifiés et du moment durant lequel elle intervient dans la reconstruction de l’image.

Quel niveau de maîtrise tu peux avoir de ces outils ?

Pour le databending, c’est difficile pour un humain d’anticiper le résultat parce que le système qu’il modifie est trop compliqué. Par contre, avec l’audiobending, tu peux savoir à peu près ce que ça va donner puisque le résultat d’un effet sonore appliqué à une image sera toujours à peu près le même. Par exemple, l’effet d’un écho aura toujours le même type d’altération. Ce qui va donner de la variation dans les résultats c’est le choix de l’image d’origine et la combinaison des effets.

Et du coup, en quoi consiste le generative art ?

Le generative art c’est créer un algorithme, donner des règles et des directions à son ordinateur qui génère ensuite des pièces. Je laisse toujours une part d’aléatoire dans ces algorithmes : c’est ce qui fait la diversité des pièces générées.

Il y a deux types de démarches dans cette méthode. Soit tu as un résultat en tête et tu vas créer un algorithme qui le réalise. Soit tu crées un système plus ou moins intelligent avec plus ou moins de règles, tu le laisses faire ce qu’il veut et, une fois que tu as un panel de résultats, tu peux adapter les règles en fonction de ce que tu veux comme rendu.

Quelle est la démarche que tu as décidé d’adopter ?

Je préfère largement la deuxième manière parce que je deviens plus le créateur de l’artiste plutôt que l’artiste lui-même. Faire de mon ordinateur un artiste et lui donner la liberté du choix des créations m’intéresse bien plus.

Comment t’es venu l’envie de faire du computer art ?

J’ai toujours été intéressé par l’intelligence artificielle. Au départ, je voulais faire de la robotique. Je me suis finalement dirigé vers l’informatique. Mais avec le computer art je renoue avec l’intelligence artificielle et la production de machine. C’est assez génial de pouvoir être un créateur avec son ordinateur.

Le titre de ton exposition c’est « Order and Coahs », en quoi cela fait écho avec ton travail ?

J’ai choisi pour thème de cette exposition l’ordre et le chaos.

L’ordre est du côté du generative ; on va donner des règles et ça va aboutir à des choses très construites même si c’est la méthode la plus aléatoire. On arrive à l’ordre via le chaos.

Pour le glitch, on arrive sur le chaos via l’ordre. J’ai choisis des images de montagnes, grandes, majestueuses qui pour moi représentent une forme d’ordre. Symboliquement, je trouve intéressant que ces représentations de paysages, qui sont donc issus du monde organique, soient détruites par un procédé numérique.

La méthode que j’applique avec le traitement de texte peut se rattacher à la question de la “sensibilité aux conditions initiales” dans la théorie du chaos : si tu changes une variable de départ, même infiniment petite, tu peux avoir des changements gigantesques à la fin, le fameux “effet papillon”.

Comment t’es venu l’idée d’une exposition ?

Ce qui m’a donné envie de faire cette exposition a été de montrer ce que je fais déjà sur internet avec un autre support, le papier, et d’installer ce que je fais sur support digital dans un lieu, une galerie.

Sur internet je produis beaucoup de choses. Grâce à l’ordinateur, je peux générer 2000-3000 images en quelques secondes. Donc ce n’est pas générer l’image qui me prend du temps mais l’élaboration du concept. Avec le support papier, le travail change. Je dois faire la démarche de choisir parmi ces images, les figer en décidant de les imprimer. D’une certaine manière, je les sors de leur contexte, ce qui est assez nouveau pour moi.

Comment te positionnes-tu dans le processus de création ?

En fait j’ai plus une place de curateur. Dans un premier temps je commande ce que je veux comme pièce. Puis, l’ordinateur interprète ma commande, et enfin je sélectionne ce qui me plait dans ce qu’il a produit.

Ce qui est intéressant aussi c’est que tu perds la paternité de ton œuvre très vite sur internet. Tu ne peux pas la contrôler comme si c’était une pièce unique gardée dans un musée.

Cette mise à disposition de ton travail fait-elle partie de ta démarche à part entière ?

Oui, mon but c’est d’expliquer aux gens comment je procède en leur donnant tous les outils et les codes pour ensuite leur permettre de le refaire eux-mêmes. C’est une idéologie du partage. Si j’ai passé du temps sur quelque chose, je trouve plus intéressant de rendre transparente ma démarche pour que ce que j’ai expérimenté puisse être réutilisé. C’est pour ça que je fais généralement du open source et je bosse pas mal en licence MIT et creative commons.

Mais ce qui est intéressant c’est qu’ils ne pourront jamais obtenir exactement le même résultat vu que j’insère une part d’aléatoire dans mes codes.

Comment tu gères cette forme de dépossession de ton travail ?

Je ne sais pas si les œuvres m’appartiennent réellement au final. En generative art, les œuvres ne sont pas les miennes. C’est l’ordinateur qui génère les pièces et pas moi. Donc je pars du principe que si c’est lui qui génère quelque chose, c’est à lui que ça appartient. Donc mon ordinateur et les algorithmes m’appartiennent, mais le résultat de ces algorithmes pas.

Est-ce que les gens, qui ne sont pas dans l’informatique, sont réceptifs à cette démarche ?

Beaucoup de gens peuvent penser que les pièces ont été faites avec Photoshop. C’est vrai que sans explication, on ne peut pas saisir la démarche qu’il y a derrière et surtout que grâce à cette démarche on peut produire un très grand nombre d’images en très peu de temps.

Les gens qui crochent avec ça sont des personnes qui font du computer art, et qui ont compris l’approche.

C’est pour ça que j’ai voulu aussi proposer des workshops, pour pouvoir expliquer mon travail et même donner la possibilité, aux gens intéressés, de s’essayer au computer art.

Les informations à retenir :

Le 5 avril à 19h, vernissage de l’exposition… en musique !

Le 29 avril, décrochage, en mode festif.

Entre deux, des workshops les mardis de 19h-21h

  • 12 avril : sur l’exposition, ce qu’est le glitch et le generative art, exposition.
  • 19 avril : sur le generative art, venez avec vos ordinateurs pour apprendre à coder et générer des images.
  • 26 avril : sur le glitch art avec des ateliers pratiques à nouveau.

Ces workshops sont ouverts à tout.e.s et gratuits !

Le lieu: La Galerie, 13 rue de l’Industrie à Genève

Event Facebook

Site internet de Julien Grünhagel

Son instagram , Tumblr, pour les codes c’est par là et

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.