Soutenir la culture alternative : quand Baz’Art se réinvente en livre

Baz’Art, c’est le festival qui a lieu chaque année, juste avant la fête de la musique, à la rue Lissignol. Cette année, Covid oblige, sa dernière édition n’a pas pu avoir lieu physiquement. Mais l’équipe curatoriale et les artistes ont tout de même décidé de transposer leur créativité dans un livre créé exclusivement en hommage à l’histoire du festival, mais aussi à la culture alternative genevoise.

Lorsque l’on manipule ce petit livre à la couverture épurée, on peut y lire simplement des lettres capitales en bâton : BAZ’ART. Une seule particularité permet de rendre chacun des 400 exemplaires unique : la tranche du livre qui contient une phrase singulière. Lorsqu’on met tous les exemplaires bout à bout, c’est un texte écrit par l’artiste-peintre Hadrien Dussoix qui prend forme.

« C’est un objet qui fait partie d’un ensemble », explique Claire, l’une des organisatrices de l’évènement. Lors du vernissage de l’ouvrage le 13 septembre dernier, Hadrien s’est alors attelé à son installation en mettant les livres ensemble et en peignant en direct son texte. Ensuite, chacun.e pouvait venir se servir d’un exemplaire unique.

Ce livre, c’est l’édition de Baz’Art 2020. Une grande première pour le festival pionnier d’une culture locale, voire ultra locale puisqu’il a lieu dans la rue Lissignol et se destine à la base aux habitants du quartier. Ce qu’il prône aussi, c’est l’effervescence et la productivité sans limite de l’art alternatif.

« Nous avons envoyé nos demandes de subvention à la ville au mois de décembre, comme chaque année », commence Simone, « une partie de notre programmation était bouclée en mars et nous avons reçu nos subventions, car à cette époque nous pensions que le festival aurait bien lieu au début de l’été ». Mais le Covid rend les choses incertaines, voire chaotiques pour les projets qui reposent sur une organisation logistique importante. « On s’est alors inspirées du DAF, par exemple, qui a décidé de lancer sa TV en livestream, tout en regardant la palette d’alternatives qui s’offrait à nous pour réinventer notre festival ». Car au mois d’avril, les curatrices de Baz’Art ont conscience que cette édition ne pourrait pas avoir lieu comme d’habitude. 

Rebondir malgré le doute : stimuler la productivité artistique

« On nous a dit : payez les artistes comme si ça avait lieu ! », explique Simone, qui propose alors tout de même aux artistes initialement programmés de participer à leur appel à projet de création pendant le confinement. « On a été agréablement surprises de l’engouement des artistes qui ont répondu présent.e.s », poursuit-elle. S’en vient alors une série de questionnements et de réflexions : que proposer pour « matérialiser » pour la première fois en dix ans le festival Baz’Art ? « On s’est toutes assez bien mises d’accord sur le format “livre”, car au fond il y a cet aspect d’objet d’art, de collection, mais aussi de mémoire et de voyage, pouvant exporter les artistes plus loin que Genève », complète Claire.

Les curatrices donnent alors carte blanche aux artistes, avec deux formulations possibles : la première consiste à retranscrire son travail en une image, et l’autre à participer à la compilation. Cette dernière est disponible sur Bandcamp et son QR code y est inscrit à la fin du livre afin de pouvoir l’écouter. « Dans ces deux projets, il était important pour nous d’avoir des oeuvres originales », précise Simone.

Comment transformer un festival en recueil artistique ?

Simone, Claire, Camille et Dunja ont travaillé de concert pour la conception du livre. Le travail des 37 entités artistiques a été mis bout à bout, et un shooting photo a été organisé afin de montrer « les visages de Baz’Art » : on y voit des habitants de la rue, des bénévoles, des artistes…

L’équipe curatrice a aussi compté sur le Do It Yourself pour réaliser 400 exemplaires à moindre coût. « Nous n’avions pas à payer les infrastructures et les installations, ce qui nous a permis de réinjecter cet argent dans la production du livre », explique Simone. Avec cette somme, les curatrices ont auto-édité le livre puis ont imprimé les ouvrages là où y sont d’habitude imprimées les affiches du festival, dans le Jura. Quant à la compilation, elle est disponible en format digital, sur BandCamp à prix libre.

Soutenir la culture alternative et revendiquer son existence

Au fond, ce livre fait également office de manifeste pour une culture alternative en pleine asphyxie à Genève. « On a l’impression qu’il y a une disparité dans les lieux qui peuvent diffuser ou pas la culture, pourtant la culture alternative continue d’exister même si elle est réprimée !», explique Simone d’un point de vue réaliste. En guise de soutien à cette culture à bout de souffle, l’équipe de Baz’Art a décidé de distribuer les ouvrages aux lieux indépendants genevois pour qu’ils puissent les revendre à prix libre. « C’est une sorte de “bisous dans le cou“, comme disait Camille, car on leur donne 20 exemplaires à vendre au prix conseillé de 20 francs », développe Simone. On peut alors retrouver des exemplaires au Rameau d’Or, à Dig It, Sounds, Bongo Joe, Halle Nord, ou à Cumulus, par exemple.

Pour la suite, Baz’Art espère déjà pouvoir organiser une édition physique l’année prochaine, mais ne compte pas attendre sans rien faire d’ici là. « On aimerait organiser des évènements privés, une fois par mois, qui permettraient de distiller notre programmation initialement prévue ! », confie Claire. En attendant de voir si le projet peut se concrétiser au vu des conditions sanitaires, l’équipe de Baz’Art se voit déjà ré-éditer un livre l’année prochaine ou, qui sait, une compilation en vinyle !

Voici la liste complète des lieux où retrouver les ouvrages de Baz’Art :

Librairie Cumulus

Librairie du Rameau d’Or

Librairie L’Oreille Cassée

Dig It Records

Bongo Joe Records

Sounds Disques

Espace Labo

Halle Nord

Cave12

Crache Papier

Librairie du Boulevard

Urgence Disk

Librairie Fahrenheit 451

Les Recyclables

L’Infokiosk (Ilot 13)

Association Gegrave

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